L’association ‘’Idéal pour la Jeunesse’’, «Idéal J en sigle», structure des jeunes œuvrant dans la société congolaise pour stimuler l’éveil de conscience à l’endroit des jeunes de par la mise en place d’un cadre des réflexions, a organisé, le samedi 7 juin 2025 dans l’Amphithéâtre de Silikin Village, situé dans la commune de la Gombe à Kinshasa, une conférence réunissant juristes, étudiants, professionnels des médias et cadres de la société congolaise. Quatre orateurs dont Me Alexis Thambwe Mwamba, Me Jean-Claude Katende, Me Jérémie Kabambi et M. Moïse Makuta, ont été conviés, tour à tour, à nourrir l’auditoire constitué des scientifiques avérés, autour du thème général «RDC, pays solution : entre illusion, appauvrissement et développement».
Le thème ainsi choisi reflète la volonté effrénée de la jeunesse scientifique à échanger sur des questions qui touchent la vie nationale dans le but de proposer des solutions idoines qui, dans un sens comme dans un autre, sortiraient le pays de l’illusion vers un cadre plus propice et plus concret de développement idéaliste.
Dans son mot de circonstance, Me Rabbi Laurent Kala Kala, président de « Idéal J », a sans ambages rassuré les participants que les résolutions qui émaneront de ce cadre de réflexion seraient mis dans un document qui sera remis aux gouvernants afin d’interpeller toutes les parties prenantes dans le but de changer de paradigme.
«Au terme de cette conférence, nous allons produire dans un document le condensé de ce qui sera dit pour interpeller tant le gouvernement que les gouvernés pour qu’ensemble nous puissions véritablement changer ce paradigme sans délai», a déclaré Me Rabbi Kala Kala.
Pour équilibrer les choses, il a proposé à l’assemblée d’élaborer une politique nationale sur la gestion et la gouvernance des ressources naturelles. C’est grâce à l’intervention des panelistes que ce travail de titan a été réalisé car, par le développement de quatre sous-thèmes, lesquels constituent la racine principale de ce paradigme, les participants ont été suffisamment outillés des éléments nécessaires pour ce changement tant désiré.
‘’RDC au cœur de la transition énergétique’’
Développé par Moïse Makuta, premier panéliste, ce sous-thème a révélé plusieurs aspects sur la transition énergétique tant vantée par la classe politique congolaise.
Cette transition implique, au niveau global, le développement de nouvelles technologies, la modernisation des infrastructures dans son ensemble, une modernisation technique et financière, une insertion juste, équitable et responsable et sensible au conflit de cette nouvelle forme d’énergie dans les équilibres géopolitique et socioéconomique existantes.
Pour y arriver, le pays est soumis à une myriade d’exigences, estime Moïse Makuta notamment, des efforts à déployer, de discipline personnelle et collective, d’adaptations et des outils d’accompagnement. « Les exigences mentales sont incontournables pour parvenir à cette transition », a-t-il indiqué. Également exigeante en termes de capacité institutionnelle et de préparation des communautés, en termes de préparation infrastructurelle. Cette transition exige enfin des adaptations du modèle socio-économique, une consolidation des fondements éthiques, un investissement intentionnel ainsi que la réduction de la dépendance minière.
Pour ce qui concerne la RDC, la transition énergétique est un changement catalysant, c’est-à-dire, tous y est soumis et aucun aspect de la vie demeure inchangé car touche tous les aspects de la vie humaine.
«Pour les questions environnementales, la RDC est le pays solution en fournissant les minerais indispensables à la transition énergétique. Cependant, la solution à apporter ne doit pas entrainer la dissolution de notre environnement, ni des chocs très profonds, trop forts à notre société», a-t-il alerté. Il faut pour cela que chaque congolais agisse avec justice et équité envers les communautés qui vivent dans les zones où ces minerais sont exploités, a exhorté ce scientifique.
Bref, cette transition qui n’est pas mécanique du fait de son évolution graduelle doit éviter le fracas de la division.
«RDC, pays solution : entre illusion des ressources naturelles, l’appauvrissement et le développement économique»
Dotée d’une richesse naturelle colossale estimée à 24 trillions de dollars mais dont la population demeure parmi les plus pauvres au monde avec plus de 73% des congolais vivant sous le seuil de pauvreté, la République Démocratique du Congo incarne l’un des paradoxes économiques les plus frappants de notre ère ». Me Alexis Thambwe Mwamba commence son exposé par une observation très alarmante au sujet du paradoxe entre l’irréel dans un pays réel.
Mais, il se pose, certes, une question si pertinente. Comment mettre fin à l’illusion des ressources naturelles comme voie automatique vers la prospérité, pour construire un modèle économique diversifié où ces ressources serviraient de levier plutôt que d’un leurre ?
La RDC, un pays aux potentialités immenses avec une population évaluée à environ 109 millions d’habitants, dont près de 46% a moins de 15 ans illustre une structure démographique très jeune. Mais, sur le plan économique, le PIB reste relativement faible avec environ 620 dollars américains par habitant. Cela reflète les défis économiques persistants du pays. Hélas ! La RDC n’a pas encore réussi à négocier son transfert du modèle économique colonial à un modèle alternatif plus adapté à son propre développement.
A cause de sa stagnation dans une économie tributaire des recettes provenant de son industrie extractive essentiellement minière, Me Alexis Thambwe a dressé un tableau sombre classant le pays dans le syndrome hollandais.
Syndrome hollandais
«Situation d’un pays dont les revenus dépendent d’un seul ou d’un nombre limité des produits et qui lui donnent l’illusion d’un bon niveau des revenus dès lors que celui-ci se vend suffisamment cher et rapporte. En ce moment, ce pays se concentre sur ce produit et néglige les autres sources de richesses dont il dispose», a expliqué cet homme politique et ancien gestionnaire d’une entreprise minière, la Sominki.
Il a, par contre, révélé que la véritable richesse ne se trouve moins dans le sous-sol. Car, il estime que ‘’l’abondance des ressources naturelles ralenti méthodiquement le développement si jamais l’on n’y prend garde’’.
Les enjeux liés au développement
Ce chevronné de l’histoire politico-économique de la RDC a proposé une série d’actes liés au développement du pays sur lesquels les gouvernants devraient plus tabler en vue de conduire le pays vers sa destinée socio-politico-économique et même sécuritaire.
A savoir : la nécessité de bonne gouvernance, de sécurité et de stabilité politique ; la nécessité d’une programmation séquencée d’interconnexion des provinces par des infrastructures de transport, avec perspectives et solutions ; la transparence ; la redevabilité ; le regard sur la diversification des marchés ; la cartographie stratégique et la capacitation locale.
«Ce renforcement institutionnel représente la pierre angulaire de toute transformation du paradoxe des ressources en RDC», a-t-il conclu son intervention.
«Ressources naturelles : arme diplomatique efficace pour une politique internationale gagnant-gagnant»
Maître Jean-Claude Katende, président de l’ASHADO, a entamé ce sous-thème par une question pertinente qui ronge le peuple congolais. Est-ce que les minerais que la RDC utilisait dans le cadre de la diplomatie peuvent-ils permettre au pays de se retrouver ?
Des minerais utiles à la transition énergétique peuvent aider la RDC à s’imposer sur le plan international pour avoir quelques gains, a-t-il déclaré. Ils peuvent également servir d’intégration de la sous-région des Grands-Lacs si et seulement ils sont utilisés comme outil d’influence dans le but d’imposer certaines négociations et certaines communications sur le plan de la sous-région.
Au niveau international, il estime qu’il est possible que ces minerais soient utilisés pour influencer certains accords afin d’avoir gain de cause dans les négociations en cours notamment, celui entre la RDC et les Etats-Unis.
«Ils peuvent donc servir d’outil diplomatique pour que la RDC s’impose ou influence certaines décisions au niveau international», a indiqué cet acteur de la société civile congolaise.
Par ailleurs, pour y arriver, il faut que le pays réunisse un certain nombre des conditions sine qua none notamment : des hommes et des femmes formés pour ce secteur et ayant une moralité irréprochable ; une bonne politique nationale des minerais de transition couplée à une vision incontestée dans leur exploitation ; une organisation sans faille pour en venir à des résultats escomptés.
«Cette dernière condition dotera le pays des institutions qui puissent permettre à ce qu’il gagne en terme d’argent mais aussi en terme de retombés social et environnemental», a-t-il conclu.
«Bonne gouvernance de ressources naturelles comme outil de développement»
Me Jérémie Kabambi, membre de l’ITIE Congo, s’est, quant à lui, attelé sur la bonne gouvernance en vue de conduire le pays vers un développement sans faille.
«Prendre conscience du rôle crucial à jouer dans cette transition énergétique et aussi le bénéfice à tirer pour qu’elle ne soit pas un rendez-vous manqué ni une simple histoire à raconter aux générations futures», a-t-il tiré la sonnette d’alarme.
Pour y parvenir, il y a un impératif d’asseoir ou d’installer une bonne gouvernance qui, en principe, détermine le bien-être de la population. La bonne gouvernance implique le respect des droits civil, économique et politique qui font défaut. Il est donc important de relever les piliers de la bonne gouvernance, lesquels constituent le socle même du développement, a-t-il estimé.
Piliers de la bonne gouvernance
Il est question de la transparence, un des piliers essentiels de la bonne gouvernance ; la responsabilité dans la gestion ; le devoir de redevabilité et la participation citoyenne.
Pour ce qui est de fondement, la gestion en termes de bonne gouvernance implique une primauté accordée au contrôle, au suivi et à la transparence fondée sur une volonté politique en vue d’éviter l’opacité.
Pour Me Jérémie Kabamba, l’adhésion à l’initiative de bonne gouvernance est incontournable lorsqu’un état désire emprunter la voie de la bonne gouvernance.
César Nkangulu
