*L’Union pour la Paix et le Développement, UNIPAD en sigle, dans sa quête de sensibilisation des congolais, en général et des peuples du Kivu, en particulier, à la cohabitation pacifique des composantes tribales et éthiques, produit régulièrement des réflexions et des tribunes, dans des médias traditionnels ou en ligne. La présente réflexion portant sur la nationalité des Banyamulenges arrive dans un contexte régional très tendue avec la guerre que mène le Mouvement M23 et ses alliés contre le pouvoir en place en République Démocratique du Congo et ses alliés ainsi que les rumeurs persistantes de la révision de la Constitution du 18 février 2006. De même, le peuple congolais tout entier est dans l’expectative d’une révision constitutionnelle selon des rumeurs qui circulent dans les réseaux sociaux. Ces deux éléments font renaître les démons de la division ethnique et donnent la part belle aux apprentis politiciens et pseudo-scientifiques à débiter des thèses divisionnistes allant jusqu’à contester la nationalité à certains compatriotes congolais. L’on comprend bien qu’il s’agit là des manœuvres tendant, soit d’impliquer tacitement et globalement ces compatriotes dans cette guerre injuste nous imposée, soit à préparer les esprits et l’opinion nationale et internationale sur une probable révision des dispositions constitutionnelles sensibles dont celle sur la nationalité. Notre réflexion est une réponse à toutes ces agitations qui refont surface, qui ne servent pas la paix et le développement de notre région longtemps soumise à des guerres cycliques. Nous allons diviser notre analyse en trois parties principales que sont les généralités où nous présenterons les Banyamulenge et les autres Tutsi du Kivu, les différents textes des lois sur la nationalité congolaise et les conclusions sous la forme des recommandations. I. DES GÉNÉRALITÉS A. Qui sont les Banyamulenge ? Les Banyamulenge constituent un peuple issu des grandes migrations qu’a connu l’Afrique, des temps immémoriaux jusqu’à la fin du 19e siècle et qui se sont poursuivies jusqu’aux indépendances de la plupart des pays africains, dans les années soixantes. Il convient de noter, avant de continuer, que ce peuple Tutsi du groupe Nilotique, s’appelait peuple Ruanda ou Banyaruanda, selon la description faite par le géographe WEISS, dans son livre intitulé Le pays d’Uvira Cette appellation, prêtant à confusion avec les Banyarwanda, citoyens de la République du Rwanda, a été abandonnée au début des années soixante-dix au profit de celle des Banyamulenge à l’initiative des sages et intellectuels de cette communauté ethnique, dont l’Honorable Frédéric GISARO MUHOZA, père de l’actuel Ministre des ITPR, Alexis GISARO MUVUNYI, membre du Gouvernement de Mme Judith SUMINWA. Des auteurs, essentiellement européens, ont abondamment écrit à propos des migrations du peuple Ruanda (Banyamulenge et autres) vers l’espace du Kivu actuel, de manière générale et la région de Fizi, Mwenga-Itombwe et Uvira, en particulier : – Selon René LOONS, l’entrée des Banyaruanda sur le sol de l’actuelle RDC aurait été constatée sous le règne du Roi GAHINDIRO du Rwanda entre 1746 et 1802 correspondant au règne du Roi des Bafuliiru LWAMWE LWE MBAKO, – Jacques DEPELCHIN abonde dans le même sens mais y ajoute une deuxième vague migratoire située entre 1855 et 1895 sous le règne du Roi RWABUGIRI du Rwanda, – WEISS, par contre, situe l’établissement des premiers Ruanda au village de Galye dans l’actuelle Chefferie des Bavira en 1881. Il en donne la description suivante : …peu avant l’année 1900, quelques familles Tutsi fuyant le Rwanda, traversèrent la Ruzizi, pénétrèrent au Congo et se fixent à Lemera dans la Chefferie des Bafuliiru, les descendants de ces immigrés gagnèrent l’actuelle Chefferie des Bavira et y fondèrent les villages de Galye, Munanira, Kishembwe et KalongeKataka. Ces villages étaient essentiellement dirigés par eux, selon un autre récit produit par René LOONS dans son livre Le Territoire des Bafulero. Malheureusement ces sources et nombreuses d’autres encore, ne s’accordent pas sur une date précise pouvant être considérée comme point marquant le début des arrivées de ce peuple dans les espaces susmentionnés. Cette difficulté serait le résultat des migrations par vagues successives ainsi que du fait de la rédaction a posteriori des récits sur ces migrations, les auteurs n’ayant pas été des témoins oculaires de ces événements. Toutefois la somme
des récits s’accordent sur le fait que le peuple Ruanda était présent sur le sol de l’actuelle République Démocratique du Congo avant 1885, date du partage de l’Afrique par des puissances européennes à Berlin, en Allemagne. L’on pourrait se poser la question de savoir pourquoi les récits présentés n’indiquent pas le passage des Ruanda au village MULENGE pour justifier l’appellation de Banyamulenge ? Il existe également des récits des auteurs européens qui font allusion à cet établissement du peuple Rwanda au village Mulenge, les enquêtes sociologiques postérieures auprès de sages de ce milieu ayant confirmé les faits. En effet, une première vague des Ruanda conduits par SAGITWE, serait partie de KAKAMBA, actuel Groupement du même nom dans la Chefferie Plaine de la Ruzizi, précisément au lieu actuellement, appelé BWEGERA et aurait atteint Lemera, sous le règne du Roi des Bafuliiru NYAMUGIRA II qui, après leur bref séjour dans la capitale de ce royaume, leur aurait demandé d’aller s’installer au village MULENGE, déjà occupé par des pygmées BASHAMWA, ascendants de l’actuel Chef du Village Mulenge I, Monsieur YAWÉ. Ce séjour plus ou moins longue des Ruanda dans ce village, aurait été à la base du choix de l’appellation de Banyamulenge en lieu et place de celle de Banyaruanda prêtant à confusion comme ci-haut décrit. Disons en passant que selon les mêmes récits des vieux sages, SAGITWE aurait été surnommé KAYIRA à cause de sa question répétitive qu’il ne cessait de poser aux autochtones pygmées en voulant s’orienter. Il aimait dire en Kinyaruanda : mundangire a kayira ko kujya ku Murenge signifiant littéralement Indiquez-moi le chemin de Mulenge De là son surnom aurait pris de forme jusqu’à surplanter son vrai nom de SAGITWE. Ses descendants portent encore, jusqu’à ce jour, ce nom comme identifiant de leur famille du clan ABASINZIRA. De MULENGE, un grand groupe des Ruanda, conduits toujours par le même chef SAGITWE KAYIRA, migra vers le sud et s’installa à MUHANGA. Rappelons en passant que l’Honorable Frédéric GISARO MUHOZA est né dans ce village du Groupement de Kigoma, Chefferie des Bafuliiru, Territoire d’Uvira dans la Province du Sud-Kivu, même si sa famille a dû, par la suite, migré vers la région de RURAMBO. C’est de ce village MUHANGA que seraient partis les Ruanda, dont parle WEISS, dans son récit et qui auraient pris la direction sud vers les hauteurs de l’actuelle Chefferie des Bavira qu’ils ont atteint en 1802. Sans poursuivre avec d’autres récits sur l’établissement des Ruanda dans les Territoires de Fizi et Mwenga-Itombwe, revenons sur la confusion délibérément orchestrée concernant les Banyamulenge migrants de la période précoloniale et les réfugiés Tutsi Rwandais de 1959. Ces réfugiés fuyant la répression des militants du PARMEHUTU, parti de Grégoire KAYIBANDA, ayant déchu le Roi KIGERI V, se sont déversés dans les 4
pays limitrophes du Rwanda. Au Congo, précisément dans l’actuelle Sud-Kivu, ils ont été installés dans des camps des réfugiés de Lemera, Mulenge et Katobo, dans la Chefferie des Bafuliiru, par le HCR. Comme à tous les réfugiés, il leur avait été demandé de s’abstenir d’interférer dans la politique du Congo. Cet organisme de l’ONU connaissait le passé politique de ces réfugiés dans leur pays d’origine. Avec les troubles politiques des années qui ont suivi l’accession de notre pays à l’indépendance, le HCR, informé d’une éventualité de l’extension de la rébellion muleliste vers l’Est du pays, précisément dans le Territoire d’Uvira, a pris des précautions de transférer ces réfugiés vers le Camp abritant d’autres Tutsi au site de GATERI, dans l’actuelle province de CIBITOKE au Burundi voisin. C’est de cette manière que les camps de Lemera, Mulenge et Katobo auraient été vidés de leurs réfugiés Tutsi Rwandais avant le début de la rébellion de 1964, dans la région d’Uvira. Le reste des réfugiés éparpillés à travers la plaine de la Ruzizi, se sont vus contraints de fuir vers le Burundi au début des hostilités mulelistes. Il est, en effet, malhonnête de considérer ces réfugiés de 1959 comme étant les mêmes Banyaruanda devenus Banyamulenge, pour des raisons susmentionnées. B. Les Banyamulenge sont-ils des congolais ? Une partie de la réponse est déjà donnée dans la description ci-haut faite sur leur installation très ancienne sur l’actuel territoire de la RDC. En effet, tous les récits écrits ou provenant de la tradition orale, confirment à suffisance cette évidence. Il serait, en effet, arbitraire de considérer comme réfugiés, les membres d’un groupe socio-anthropologique qui s’est installé dans une région avant le partage de l’Afrique par les puissances européennes, qui ont fixaient les limites fondatrices des États actuels. Quel que soient les textes forgés sur la question sur la nationalité congolaise, aucun ne permet de démontrer l’exclusion des Banyamulenge de cette nationalité congolaise. Des politiciens et autres pseudo-chercheurs à la recherche de positionnement et de clientélisme politiques, s’activent à démontrer sans convaincre, que les Banyamulenge ne constituaient pas une ethnie ou une tribu congolaise aux termes des dispositions de l’article 10 alinéa 2 de la Constitution du 18 février 2006. Ils fondent leur argumentaire sur le fait que cette dénomination ne figurerait pas sur la liste des 450 tribus et ethnies fondant le peuple congolais. S’il ne s’agirait pas d’une ignorance, ce serait alors un acte délibéré pour nuire. Nous venons de démontrer, sous réserve d’être scientifiquement contredit, que les Banyamulenge actuels, jadis appelés Banyaruanda, sont le même groupe ethnique présent sur l’actuelle RDC avant même la création de l’État Indépendant du Congo par Léopold II, Roi des Belges.
En plus, existe-t-il un document juridique qui limite les ethnies et tribus de la RDC à 450 pour que toute autre découverte d’omissions éventuelles fasse l’objet du vote d’une loi additive ? Nous voudrions citer ici le cas des pygmées qui sont, dit-on les premiers occupants de la RDC. Quelqu’un peut-il nous donner le rang qu’occuperaient ces compatriotes sur cette fameuse liste des tribus et ethnies de la RDC ? C’est dire donc que brandir cette liste ne constitue en rien une preuve de la négation de la nationalité des Banyamulenge. En conséquence et au terme de l’article 10 alinéa 1 de la constitution du 18 février 2006, tout membre de l’ethnie Banyamulenge, qui n’a pas opté pour une autre nationalité, est congolais d’origine comme tout autre congolais du centre, de l’Est, de l’Ouest, du Nord et Sud, remplissant les conditions requises par l’alinéa 1 de l’article constitutionnel ci-haut, mentionné. Les pseudos chercheurs actuels recourent à des théories très anciennes pour expliquer le déni de nationalité aux Banyamulenge et à leurs congénères Tutsi en avançant des critères comme : – La culture incompatible à celle des autres congolais Ces chercheurs ignorent volontairement que les éléments constitutifs de toute culture d’un peuple sont principalement la langue, les us et coutumes (mariage, éducation sociale, mode de vie etc.) Pouvons-nous savoir si les 450 tribus et ethnies actuellement brandis comme constituant le peuple congolais, auraientils la même culture ? Nous avons également découvert que cette théorie de l’uniformité de la culture vient des penseurs et anthropologues allemands, précurseurs de l’idéologie nazie sur la suprématie des races humaines. Tout le monde connaît les ravages de cette théorie lors de la seconde guerre mondiale provoquée par le tristement célèbre Adolf Hitler. Six millions des juifs ont tués dans ce qui est aujourd’hui reconnu comme étant le plus grand holocauste du 20e siècle. – L’acceptation par les autres groupes ethniques ou tribaux Il s’agit d’une autre absurdité avancée par des aventuriers chercheurs. Notre pays a connu des affrontements entre des tribus voisines dans l’Équateur (la guerre des Enyele), dans le Mai-Ndombe, où l’administration du Territoire concerné a été jusqu’à ce jour confiée à un Colonel FARDC de l’ethnie Banyamulenge, ayant arrêté les tueries mutuelles entre ces compatriotes ainsi que récemment dans les plateaux des Bateke où deux tribus s’entredéchiraient. Ceux qui se sont affrontés dans tous ces coins du pays restent congolais malgré leurs différends et les affrontements qui s’en ont suivi. – Les Banyamulenge seraient à la base des guerres qui ont déchiré le pays. D’où ils ne peuvent être considérés comme des congolais. Cet argument ne tient non plus la route car il n’est, non seulement basé sur la globalisation des actes commis par une infime partie des Banyamulenge, mais aussi, il démontre l’ignorance de l’histoire des conflits armés de notre pays.
Tenez, le 11 juillet 1960, Moïse CHOMBÉ proclame la République du Katanga, ses mutins et lui-même sont du Haut Katanga, en majorité de la tribu Karund ou Karunda. Ont-ils été déchus de leur nationalité congolaise après leur défaite ? Dans les années quatre-vingt, L.D KABILA dit Mzee, mène des expéditions meurtrières dans le Territoire de Moba dans l’actuelle province de Tanganyika. Est-il devenu étranger après son échec face aux forces régulières ? Ma conclusion est sans appel, les Banyamulenge sont des congolais d’origine. Ils sont appelés, comme tous les congolais, à faire preuve de patriotisme sans faille.
II. DES TEXTES DE LOIS SUR LA NATIONALITÉ CONGOLAISE
Nous n’avons rien de long à disserter là-dessus sauf de dire que l’instabilité de ces textes ont, plus d’une fois, rendu apatrides des centaines des milliers des compatriotes et créé des foyers des tensions ethniques qui s’observent, jusqu’à présent, dans la région. Sans trop entrer dans les détails de toutes les lois sur la nationalité congolaise, voyons comment l’une d’elles a contribué à exacerbée les divisions des peuples du Kivu.
Il s’agit de la loi Nº 1981/002 du 29 juin 1981 sur la nationalité zaïroise. Ce texte est considéré comme celui qui a rendu apatride les Banyamulenge et autres Tutsi du Kivu. Dans son exposé des motifs, il est expressément écrit ce qui suit : Tirant toutes les conséquences de ce principe, la présente, outre qu’elle abroge la loi Nº 72-002 du 5 janvier 1972, annule—l’article 15 de ladite loi qui accordait collectivement la nationalité à certains étrangers établis au Zaïre Ainsi, l’article 4 de cette loi disposait de la manière suivante : Est zaïrois au terme de l’article 15 de la Constitution, à la date du du 30 juin 1960, toute personne dont un des ascendants est ou a été membre d’une des tribus établies sur le territoire du Zaïre dans ses limites du 1er août 1885, telles que modifiées par les conventions subséquentes. Jusquelà, les Ruanda de WEISS dits Banyamulenge, à ce jour, se trouvaient dans la période leur conférant la qualité d’être appelés zaïrois (actuellement congolais). Mais une confusion a été savamment entretenue dans cette nouvelle loi surtout dans son application sur le terrain. Certaines personnes bien qu’installées dans l’actuelle RDC dans la période fixée par cette loi, se verront considérées comme des étrangers au motif fantaisiste qu’il était impossible de distinguer les Tutsi et de les classer selon les dates de leur arrivée. Les pouvoirs publics, se référant à la fameuse liste des 450 tribus et ethnies, ont carrément ignoré la nationalité des Tutsi, de Rutshuru à Minembwe en passant par Masisi et Kalehe montagneux au motif qu’ils n’appartenaient à aucune tribus parmi les 450. Comme conséquence de cette nouvelle loi, il y a eu : – des centaines des milliers des compatriotes rendus apatrides, – sabotage en 1984, des opérations de recensement général dans le Rutshuru, Masisi, Kalehe et les hauts plateaux de Fizi, Mwenga-Itombwe et Uvira, – Invalidation des mandats des de tous les Tutsi délégués de leurs base à la Conférence Nationale Souveraine, CNS de 1991-1992, au motif de détention d’une nationalité douteuse sans autre forme de recours. Cette mesure avait entraîné également l’invalidation d’autres ressortissants du Kivu à faciès Tutsi, principalement certains Bashi et Bahavu. Cette loi a été brandie en 1995 au cours d’une des plénières du Haut Conseil de la République/Parlement de Transition (HCR/PT) issu de la Conférence Nationale Souveraine. Une Commission avait été mise en place pour investiguer au Nord-Kivu et au SudKivu en vue de recenser les étrangers et décider de leur sort. La Commission VANGU, du nom de son Chef de délégation, l’honorable VANGU MAMBUENI, s’était alors transportée sur le terrain et produit un rapport sans surprise : les Tutsi dits rwandophones pour la circonstance, étaient des étrangers. La plénière dirigée, ce jour-là, par le Vice-président du HCR/PT, l’honorable ANZULUNI BEMBE, en l’absence de son Président, l’Archevêque MONSENGWO PASINYA, prendra une résolution historique d’expulser du territoire national, sans autre forme de procès, non seulement tous les réfugiés hutu rwandais de 1994 mais également tous les supposés étrangers, les rwandophones Tutsi, au 31 décembre 1995. Cette résolution rencontrera l’opposition des certains conseillers de Mobutu, la jugeant très dangereuse pour la sécurité intérieure et extérieure du pays et ne sera plus appliquée. Voilà le décor dans le lequel la guerre dite de l’AFDL, que des journalistes étrangers ont, abusivement appelée guerre des Banyamulenge, surprend les autorités zaïroises. Cette guerre et d’autres qui ont suivi, n’ont jusqu’à ce jour, réussi à trouver des solutions aux problèmes ethniques du Kivu malgré la loi actuelle sur la nationalité congolaise qui semble pourtant avoir été rationnelle par rapport aux textes précédents. Bien que l’apatridie consacrée par la loi de 1981 ce soit éloignée d du présent texte, des politiciens et autres opérateurs extrémistes continuent à distiller des messages de haine ethnique non seulement dans les réseaux sociaux mais chose étonnante, même dans le Temple de la démocratie à savoir l’Assemblée nationale. En effet, les envolées oratoires rappelant les débats au sein du Haut Conseil de la République/Parlement de Transition, avaient été entendues et des termes comme Tutsi Rwandais ou réfugiés Rwandais avaient refait surface. Il est à rappeler que la plénière s’était enflammée de manière inattendue lors du débat sur, l’on s’en souvient, l’installation de la Commune de Minembwe.
III. CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS
L’analyse que nous venons de proposer aux congolaises et congolais, est une alerte provenant d’un observateur avisé des questions de sécurité, paix et réconciliation dans la région du Kivu. Nous sommes partis de la question de savoir si la nationalité des Banyamulenge était une réalité ou un leurre politique. Après passage en revue des évènements qui se sont déroulés au Kivu en général et dans la région des hauts plateaux du sud de la province du SudKivu en particulier, il va de soit que les Banyamulenge et autres Tutsi de Kalehe et du Nord-Kivu, sont bel et bien des congolais au terme des dispositions de l’article 10 alinéa 2 de la Constitution du 18 février 2006. Mais les pouvoirs publics n’ont jamais mis en place des structures pour la vulgarisation de cette disposition et informer correctement les congolais sur la problématique de la nationalité des Tutsi et de leur éviter des interprétations erronées, conduisant très souvent à des heurts à caractère ethnique. Il est dès lors clair que cette disposition supposée avoir fixé les conditions requises pour qualifier les habitants de la RDC comme congolais ou pas, peine à être acceptée par une partie non négligeable de la population congolaise. D’où ce que nous avons appelé un leurre politique auquel nous concluons sans ambages. Que faut-il faire pour que cette situation s’amé s’améliore et devienne conforme à la Constitution et à la loi sur la nationalité ? Des recommandations ci-après, sont préconisées.
Il s’agit de :
1) La création d’une Commission Vérité et Réconciliation pour les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu à la manière de l’Afrique du Sud, et ceci, à l’issu d’une Conférence à organiser sur la sécurité et la paix au Kivu, pour : – Passer au peigne fin tous les cas de violations mutuelles des droits de l’homme, – Amener le peuple de cette région à se pardonner mutuellement et d’enterrer la hache de guerre, – Proposer des projets intégrateurs capables de mettre ensemble les ex-belligérants lors de l’exécution desdits projets,
2) Mettre en place une programme spécial de reconstruction du Kivu Cette espèce de « Plan Marshall » pour le Kivu aurait comme objectif de refonder le tissu socioéconomique de cette région dévastée par des guerres récurrentes. Ce gigantesque plan nécessiterait l’appui des partenaires traditionnels de la RDC. Il concernerait toutes les populations des zones touchées par les conflits armés dans le Kivu (Nord-Kivu et Sud-Kivu)
3) Mettre en place des mécanismes pour une Justice transitionnelle pour : – Juger les cas des crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis par tous les belligérants depuis 1996 à ce jour, – Exiger des réparations éventuelles en faveur des victimes vivantes ou de leurs proches, – Indemniser les populations de plusieurs manières pour leur permettre de reprendre leurs activités économiques traditionnelles.
4) Financer les activités du P-DDRCS (Programme de Désarmement, Démobilisation, Relèvement Communautaire et Stabilisation).
5) Clarifier le rôle du P-DDRCS par rapport à la RAD (Réserve Armée pour la Défense de la République) et éviter ainsi la confusion pouvant entraîner des heurts dans leur application sur le terrain,
6) Aux parlementaires et autres politiciens congolais, d’éviter toute manipulation des dispositions constitutionnelles sur la nationalité congolaise et mettre plutôt définitivement un terme à l’apatridie politique des certains compatriotes, source des malaises et des conflits armés interminables ainsi que de l’instabilité chronique dans la région du Kivu. Merci encore pour avoir accepté de nous lire. L’œuvre humaine étant toujours imparfaite, nous nous mettons, dès à présent, à la disposition des lecteurs, pour des éventuelles corrections, suggestions ou recommandations supplémentaires, allant dans le sens de ne rechercher que la paix, la réconciliation, pour un développement durable de notre pays, en général, et de la Région du Kivu, en particulier.
Fait à Bukavu, ce 28 septembre 2024.
Godefroy Muhivwa Ngwebo, Député national honoraire, Expert en paix et réconciliation à l’Est du pays et dans la région des grands lacs Contacts : WhatsApp : +243891922169 Tél : +243998911088 E-mail : mngwebo1@gmail.com