Le journaliste Jordache Diala et le mécène Mbuta Lombi sur Château Rouge à Paris
Jordache Diala et le célèbre combattant Doudou Mbaki à Paris
Fally Ipupa, la star internationale de la Rumba congolaise
*La reprise des activités musicales par les artistes musiciens congolais sur la scène européenne a été saluée dans la communauté congolaise de France. Les compatriotes de la diaspora ont exprimé leur point de vue au micro du journal La Prospérité lors de notre passage à Paris en France.
«Nous sommes heureux que les concerts de musiciens commencent à reprendre petit à petit. C’est un ouf de soulagement ! L’absence des spectacles dans les salles a été un manque à gagner pour nous les producteurs et distributeurs des œuvres musicales congolaises en France. On avait plus de produits congolais en termes de lives de musique. Or, un support DVD (vidéo) d’un concert est notre marchandise de base », a déclaré Paul Muanza Nsumbu, distributeur -producteur de musique congolaise et Manager des Éditions »Youyou Music » à Paris.
Et d’ajouter : « Le phénomène combattant est allé plus loin jusqu’à semer un esprit de haine et de sabotage contre notre propre musique. Conséquence : même les clips vidéo de nos musiciens ne s’achètent plus. Ils sont devenus indésirables dans nos étalages. Aujourd’hui, la majorité de distributeurs de musique congolaise en Europe ont fermé leurs maisons. La vente sur Internet avec le téléchargement (streaming) a aussi bouleversé les données en termes de consommation et business. Le retour des spectacles dans les salles européennes va permettre à notre musique de reprendre sa place qu’elle occupait avant 2010. Cela ne signifie pas qu’il y a eu une victoire sur le combat mené par la diaspora. Parce que le phénomène combattant en Europe a été aussi une belle option pour faire pression sur les dirigeants congolais. D’ailleurs, c’est grâce à ce combat qu’il y a aujourd’hui un changement du régime politique au pays », a-t-il souligné.
Les commerces ressuscités dans la communauté
Selon les témoignages reçus dans la communauté, les dernières prestations scéniques de Fally Ipupa et Ferré Gola, deux stars de la Rumba congolaise ont été des occasions pour les restaurants et salons de coiffures de Congolais à Paris de booster leurs chiffres d’affaires.
«L’absence de la musique sur la scène parisienne a paralysé les activités au niveau de notre communauté. Les restaurants, les boîtes de nuit ainsi que les salons de beauté des congolais ont connu un arrêt total. Grâce à la reprise des concerts, on a senti une autre ambiance dans la communauté. Je me souviens combien Château Rouge a été en ébullition, le jour du concert de Ferré Gola dans la salle Addis Arena à Paris de 18ème. Nos restaurants et salons de coiffure ont fait des recettes comme jamais auparavant. Pendant deux jours d’événement, les affaires ont bien tourné. Certains commerces ont fonctionné jusqu’à l’aube. J’avais fermé mon restaurant à 4 heures du matin parce qu’il y avait trop de monde. Boissons et nourritures ont été toutes consommées par les visiteurs en délégation venus de Belgique, Suisse, Italie, Allemagne, Londres et j’en passe. Des hôtels ont été inondés…», a soutenu Claude –Albert Lombi, tenancier du restaurant ‘‘Mbuta Lombi’’ sur Marcadet à Paris.
Et de poursuivre : «Nous sommes contents que les musiciens viennent pour défendre notre culture et pour nous égayer. Leur présence contribue à l’épanouissement de nos business. Mais, que ces artistes ne viennent pas pour semer des troubles dans les foyers de compatriotes congolais qui ont élu domicile en Europe. Car, ils sont aussi à la base des désordres dans certaines familles. Ils sont nombreux qui ne viennent pas que pour faire leur travail mais pour détruire la vie de nos filles. Il y en a qui ont engrossé nos enfants pour avoir facilement le titre de séjour en France. Une fois qu’il a le document voulu, il abandonne la fille. Cette réalité fait énerver et provoquer la colère des combattants en Europe. Nous connaissons des musiciens qui ont même pris des femmes de leur proche, parce que ce dernier a commis l’erreur d’accepter de l’héberger dans sa maison. Il y a aussi des jeunes qui se sont retrouvés en prison parce qu’ils ont volé un bijou, une chaussure ou une chemise dans une boutique de marque pour faire cadeau à un musicien. Cette réalité suscite aussi la colère des combattants. Nous voulons que ces bêtises des artistes ne se reproduisent plus dans notre communauté», a martelé Mbuta Lombi.
Fin embargo, la Rumba retrouve sa place !
Après la reconnaissance de la Rumba congolaise sur la liste de patrimoines immatériels culturels de l’humanité en 2022, il est impérieux que les ambassadeurs de cette musique puissent la défendre sur la scène internationale. Mais, la pratique n’a pas été facile pour les musiciens congolais de la RDC qui ont été placés sous embargo par les combattants (diaspora) en Europe jusqu’aux Etats-Unis.
On se souviendra que de 2010 à 2022, le phénomène «Combattant» avec les compatriotes congolais de la diaspora boycottaient violemment toutes les productions musicales par des artistes Kinois dans le territoire Schengen sous prétexte que les musiciens soutenaient le régime de l’ancien président Joseph Kabila.
L’arrivée au pouvoir en 2018 de l’actuel chef de l’Etat Félix Tshisekedi venu lui aussi de la diaspora en Belgique semblait changer la donne mais les discussions n’avaient pas abouti à un consensus afin de permettre aux ambassadeurs de la Rumba de s’exprimer dans les grandes salles mythiques européennes.
Une bande des résistants observe la situation!
C’est finalement en 2023 que la première note musicale a retenti à U-Arena en France avec la star du moment Fally Ipupa ‘‘Aigle’’ qui a ouvert le chemin pour la reprise des spectacles en Europe. D’aucuns n’ignorent combien la police française a été déployée ce jour-là pour contrecarrer les combattants qui voulaient s’en prendre à ce concert.
La star congolaise a réédité le même exploit à Paris la défense Arena en novembre dernier devant plus de 40 milles spectateurs venus du monde entier.
Fally Ipupa Aigle en a été suivi par son ‘‘rival’’ Ferré Gola qui a pris la destination d’une autre salle Adidas Arena toujours en plein cœur de Paris pour défendre la Rumba durant deux jours d’affilé.
Face à ces évènements, les combattants sont restés encore une fois immobiles.
«Savez-vous que notre première mission était de chasser Kabila au pouvoir. Sur ce point, nous avons remporté la victoire. Il reste d’autres revendications. Ce n’est qu’une trêve. Le combat n’est pas encore fini. Nous suivons de près la situation telle qu’elle se passe au pays. Jusque-là rien n’a changé sur le plan social malgré le départ de Kabila. La souffrance de la population ne fait qu’augmenter. Vous êtes témoins de l’insécurité à l’Est du Congo-RD. Entre temps, certaines autorités excellent dans le détournement de deniers publics. Mettez-vous en tête que la reprise des concerts en Europe n’est pas un opium pour distraire. Si les choses ne s’améliorent pas, nous allons appliquer d’autres stratégies pour interpeller le régime en place y compris la communauté internationale», a conclu Doudou Adrien Mbaki, un des pionniers du Mouvement des combattants en France.
Et de conclure : «Nos musiciens vont continuer à faire leur travail mais ils doivent savoir que l’art ne peut pas prendre en otage tout un peuple et le rendre naïf alors que le pays va mal. Je pense qu’un moment viendra où la musique sera au service du combat, au-delà d’être une détente».