Tenus du 28 juillet au 6 août à Kinshasa, les Jeux de la Francophonie ont été un défi de taille pour la République Démocratique du Congo, en général, mais bien plus pour les autorités congolaises. Confiés à la RDC en juillet 2019 et initialement prévus en 2021, ces jeux avaient été reportés à cause de la pandémie du Coronavirus pour le mois d’août 2022 avant d’être reportés une fois de plus à cause des retards que connaissait la RDC dans l’organisation.
Que retenir ?
Si d’aucuns affirment que le pari a été gagné par la RDC vu l’engouement, les infrastructures, la communication, la sécurité qui ont été de la partie, il y a lieu de revenir sur les péripéties qui ont été des casse-têtes pour les organisateurs.
A la tête de l’Organisation : Isidore Kwandja, spécialisé en management des Organisations publiques, Gestion axée sur les résultats et Réforme des administrations publiques, avait été désigné par Félix Tshisekedi en octobre 2021, afin de rattraper le retard accumulé par le comité sortant.
La RDC a dû faire face à la méfiance de plusieurs pays membres de la Francophonie dont certains se sont désistés à la dernière semaine pour des raisons « sécuritaires » et « sanitaires ».
En effet, quelques mois avant la tenue de ces jeux, la Capitale congolaise a dû faire face à une vague d’enlèvements dont la plupart se sont soldés en meurtre.
Si le cas de la milice Mobondo se déroulait loin du centre-ville, cette nouvelle tare sécuritaire avait lieu à différents endroits du centre-ville, de quoi inquiéter les participants, sans compter les innombrables arrestations dont ont été victimes certains acteurs politiques, le cas le plus extrême s’étant soldé par le meurtre de Chérubin Okende.
Dans l’hémisphère nord, les médias se sont spécialisés dans la diffusion de nouvelles de l’insécurité en Afrique noire, donnant peu, voire pas du tout de temps, d’espace pour les progrès naissants, l’avancée de la technologie ou encore les diversités culturelles.
Certains ont même taxé ces désistements de «politique», supposant des lobbyings de certains ennemis du Congo, individus comme Etats. L’un des cas les plus frappants est celui du Québec qui avait évoqué des raisons d’ordre sécuritaire pour ne pas s’y rendre, suite à quoi certains athlètes avaient écrit une lettre ouverte demandant au Gouvernement de revenir sur sa décision.
Tensions RDC-Rwanda
Depuis un certain temps, il ne fait aucun doute que Kigali apporte un soutien tant matériel qu’humain aux rebelles du M23, cette tension ne cesse de grandir et ce, même dans le chef de la population.
A l’approche de l’événement, la population exprimait déjà son désaccord au sujet de la venue de Louise Mushikiwabo, secrétaire générale de la Francophonie, d’origine rwandaise.
Certains allaient même plus loin jusqu’à se demander comment une ressortissante d’un pays qui a tourné le dos à la Francophonie peut diriger cette communauté ; de quoi réveiller l’animosité d’une bonne partie des Congolais vis-à-vis de la France, jugée proche du Rwanda et indifférente à la situation à l’Est de la RDC.
Au mois de mai, cela avait suffi à certaines organisations de la Société civile pour manifester devant l’ambassade de France pour exiger la non-tenue des Jeux.
Au cours de l’organisation, un jeu de ping-pong, des refus « courtois » et «diplomatiques» ont été observés entre Louise Mushikiwabo et le Gouvernement congolais.
A quelques semaines du lancement des activités, des questions ont été soulevées au sujet de la participation ou non de Louise Mushikiwabo aux activités ; le Gouvernement congolais par le biais de son porte-parole Patrick Muyaya a alors laissé entendre qu’en tant que coorganisatrice, elle n’a pas besoin d’être invitée, il va de soi qu’elle soit présente.
Suivant la procédure diplomatique, la porte-parole de Louise Mushikiwabo a finalement annoncé que celle-ci ne viendra pas parce qu’elle n’a pas reçu d’invitation de la part du Gouvernement congolais.
Une issue qui, finalement, arrange les Congolais !
Les festivités !
Engouement, détermination, joie ! Tels ont été les maîtres mots des Congolais durant les Jeux de la Francophonie. De la cérémonie d’ouverture jusqu’à la soirée de clôture, les Kinois étaient au rendez-vous !
Les jeux se déroulant au stade de Martyrs, au stade Tata Raphaël et au Musée National, les activités jonglaient entre football, basket, athlétisme, judo, … ou encore les concerts durant les nuits de la Francophonie : Ferré Gola, Fally Ipupa, Werrason, Bill Clinton…autant d’artistes congolais qui se sont succédés sur la scène au grand bonheur du public et au grand dam de ceux qui n’ont pas été sélectionnés pour prester à l’instar de l’artiste Alesh qui décrie la mise sur le banc de touche des artistes urbains.
Bon à savoir
Réussite totale ! Blason redoré ! L’on parle même de miracle congolais !
L’hospitalité du peuple, son engouement, son appropriation des Jeux ainsi que celle de ses autorités sont autant de faits qui ont marqué les visiteurs.
Il va sans dire que les différentes délégations s’en vont avec une image de la RDC différente de celle dépeinte par certains médias.
Toutefois, ces Jeux, vendeurs de l’image de la RDC toute entière, ont rencontré l’indifférence d’une certaine catégorie des leaders congolais.
L’on a peut-être assisté à une nouvelle opposition, qui dédaigne chaque action posée par le pouvoir en place, bonne ou mauvaise.
Pour mobile, il s’agirait d’une « distraction » de plus, qui éloigne les Congolais de la réalité « macabre » qu’ils vivent.
Ont-ils raison ? L’histoire nous répondra comme elle l’a si bien fait avec le combat Ali-Foreman.
Toutefois, les autorités, en général, et le Ministère de la cohésion nationale, en particulier, devraient se demander si le reste du pays s’est effectivement senti concerné par la tenue de ces Jeux…
Déborah Nitu