C’est si évidemment que toutes les Institutions publiques ainsi que toutes les forces politiques et sociales congolaises sont conseillées de s’y préparer après l’affirmation de la tenue de ces assises par Bintou Keïta, cheffe de la Monusco…
En effet, intervenant le mardi 30 septembre 2025 à la réunion du Conseil de sécurité de l’Onu consacrée à la situation en RDC, elle a fait la déclaration selon laquelle _“Au sein du pays, une initiative de dialogue interne a vu le jour. Elle est portée par les principales confessions religieuses et soutenue par le Président Félix Tshisekedi. Elle a déjà produit des résultats : une feuille de route publiée en août marque une étape décisive. Ouvrir l’espace civique et renforcer la cohésion sociale sont essentiels. Sans cela, les élections générales de 2028 ne pourront bénéficier d’un climat de sécurité et de confiance. J’appelle tous les responsables politiques à être inclusifs. A condamner les discours de haine d’où qu’ils proviennent. A choisir le dialogue. En même temps, j’exhorte la population à s’abstenir de tels discours, à ne pas propager la désinformation et la mésinformation…
Opter pour un régime présidentiel ou parlementaire
Prophétie de malheur ? Non. Pragmatisme ou realpolitik plutôt !
Et pour cause !
Il aura fallu peut-être l’alternance démocratique du 24 janvier 2019 pour que le régime « primo-ministériel » prôné et promu par le constitutionnaliste Evariste Boshab – régime sous lequel Joseph Kabila a évolué entre 2006 et 2018 – soit perçu dans une autre dimension.
Lorsqu’il avait pris la défense du Premier ministre FCC Sylvestre Ilunga Ilunkamba « contourné » dans l’affaire « nominations à la Cour Constitutionnelle » en juillet 2020, il avait fait valoir que « Nous sommes dans un régime Primo-Ministeriel dans lequel le 1er Ministre a plus de pouvoir que le Président de la République ».
Cinq ans après, beaucoup d’eau a coulé sous le pont si bien que sa position a évolué. Dans une prise de position qui lui est récemment attribuée, Evariste Boshab s’est posé cette question : « peut-on continuer à gouverner avec un texte conçu dans un contexte de guerre, sans mandat populaire, et dont les failles sont reconnues par tous ? ». Et d’adresser cette pique : « Ceux qui dénonçaient les inepties refusent aujourd’hui toute révision. C’est illogique» ; allusion faite au boycott du référendum constitutionnel de décembre 2005.
Comment alors opérer ?
En vérité, la Constitution du 16 février 2006 telle que modifiée et complétée par la loi n°11/002 du 20 janvier 2011 ne pouvait pas convenir à Félix Tshisekedi, ni à Martin Fayulu, pas plus d’ailleurs qu’à Emmanuel Ramazani Shadary s’il avait succédé à Joseph Kabila à l’occasion de la présidentielle du 30 décembre 2018.
Déjà, à l’instar de son père Etienne Tshisekedi qui rêvait d’être Mobutu sans Parti Unique, Félix Tshisekedi ne voyait (et ne voit) le Pouvoir que sous le prisme du présidentialisme à la maréchal.
A ses yeux, le Premier ministre a tout du Premier commissaire d’État, entendez un coordonnateur de l’Exécutif national. Du reste, dans l’imaginaire udepesien, une présidence sous régime primo-ministériel était et est de tout ce qu’il y a d’inconcevable.
À la base : l’alinéa 1 de l’article 70 de la Constitution selon lequel « Le Président de la République est élu au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois ».
Récapitulons les étapes :
- le candidat a pour circonscription électorale le territoire national avec ses 26 provinces et pour électorat tous les Congolais en âge de voter ;
- le candidat fait sa campagne avec son projet de société reflétant sa vision pour son pays et son peuple ;
- une fois élu, le candidat se retrouve face à l’article 91 dont voici les quatre premiers alinéas :
« Le Gouvernement définit, en concertation avec le Président de la République, la politique de la Nation et en assume la responsabilité ».
« Le Gouvernement conduit la politique de la Nation ».
« La défense, la sécurité et les affaires étrangères sont des domaines de collaboration entre le Président de la République et le Gouvernement » et
« Le Gouvernement dispose de a publique, des Forces armées, de la Police nationale et des services de sécurité ».
À l’analyse de chacun de ces quatre alinéas, il s’avère que :
- Ce n’est pas le Président de la République ELU au suffrage universel qui définit la Politique de la Nation. C’est plutôt le Gouvernement qui n’a pas vocation d’être élu!
- Le Gouvernement conduit la Politique de la Nation. Or, la Politique de la Nation n’est rien d’autre que le deal que passe le candidat Président de la Républiques ÉLU avec le souverain primaire ÉLECTEUR !
3 et 4. Si la défense, la sécurité et les affaires étrangères sont des domaines de collaboration entre le Président de la République et le Gouvernement, l’article 4 impose le contraire. Son contenu est : « Le Gouvernement dispose de l’Administration publique, des Forces armées, de la Police nationale et des services de sécurité ».
En français facile, disposer veut dire avoir autorité pleine et totale sur quelqu’un ou quelque chose.
Au regard de ce qui précède, il est clair que la RDC doit opter pour un régime présidentiel ou parlementaire ; le régime primo-ministériel cher au Pr Evariste Boshab ayant fait son temps.
Comment alors opérer ?
Dans le premier cas de figure, l’élection présidentielle se fait au suffrage universel direct avec pour conséquence logique un chef d’État élu qui doit répondre personnellement de sa gouvernance devant le Parlement, via notamment le discours sur l’état de la Nation.
Dans le deuxième cas de figure, l’élection présidentielle se fait au second degré au niveau de l’Assemblée nationale, voire du Congrès réunissant les deux chambres, quitte à aller inaugurer des chrysanthèmes !
Il va bien falloir que la question de la forme de l’état soit clarifiée
Outre le régime politique, la Constitution en vigueur ne détermine pas la forme de l’Etat.
Quelques exemples édifiants :
-la Constitution de la Belgique reconnaît à son article 1 que ce pays « est un État fédéral qui se compose des communautés et des régions ».
-la Constitution de l’Allemagne reconnaît au point 1 de son article 20 que ce pays est : « un État fédéral démocratique et social ».
-la Constitution de l’Angola dispose à l’article 8 : « La République d’Angola est un État unitaire qui observe, dans son organisation, les principes de l’autonomie des collectivités territoriales et de la déconcentration et décentralisation administratives, dans les conditions prévues par la Constitution ».
-la Constitution du Congo-Brazzaville établit à l’article 1 que ce pays : « est un Etat de droit, souverain, unitaire et indivisible, décentralisé, laïc et démocratique ».
Or, la Constitution de la RDC est muette sur le sujet. Son article 1 est ainsi énoncé : »La République Démocratique du Congo est, dans ses frontières du 30 juin 1960, un Etat de droit, indépendant, souverain, uni et indivisible, social, démocratique et laïc ».
Effectivement, nulle part dans ses 229 articles la forme de l’État n’est définie.
Il va bien falloir que la question de forme de l’État soit clarifiée.
Des idées dans le sens d’améliorer le contenu de la loi fondamentale
Dans tous les cas, le régime politique et la forme de l’État ne sont pas des matières verrouillées à l’article 220 interdites de révision constitutionnelle. De ce fait, il s’agit de matières révisables.
Il est à noter qu’elles ne sont pas les seules.
20 ans après la promulgation de la loi fondamentale actuelle, une évaluation scientifique de son application mérite tout de même d’être faite en vue de révéler des « faiblesses » à élaguer ou à corriger.
Tel est le cas de l’article 175 relatif à la retenue à la source de certaines ressources budgétaires. Jamais il n’a été appliqué. Sa non-application est à la base du sous-développement des provinces.
S’agissant de la question sécuritaire à l’Est devenue récurrente, on n’a pas à s’en cacher la face puisqu’elle touche à deux points essentiels : la propriété foncière et la nationalité.
On ne peut pas continuer à déclarer régler le problème de la nationalité lors de l’indépendance en 1960, ou de la CNS en 1991-1992 ou encore au Dialogue intercongolais en 2003 alors que reste pendant celui de la propriété foncière.
En Afrique, il n’existe pas de terre sans tribu ni de tribu sans terre.
En RDC, c’est davantage évident.
Il va de soi que des options doivent être levées courageusement pour le binôme « terre-tribu ».
Dans la foulée de ce qui devient la problématique de la nationalité, il faudra épargner le pays du ridicule qu’est le procès Kabila.
Tous les protagonistes intervenus dans cette affaire arrivée à terme le mardi 30 septembre 2025 (Sénat, Haute cour militaire et avocats engagés par la République dont Me Richard Bondo) ne devraient jamais livrer le Congo en spectacle comme ils l’ont fait.
Au fait, en soulevant cette problématique dans cette chronique, la préoccupation majeure est d’intégrer dans la Constitution à venir le statut des anciens chefs d’État élus puisque dans le texte en vigueur est antérieur à la loi du 26 juillet 2018.
Autre sujet non moins important visant l’institution Président de la République : la désacralisation de la fonction. Il faut bien que cela s’arrête. Les sanctions prévues pour outrage au chef d’Etat dans le Code pénal ne suffisent pas. Il y a lieu d’intégrer dans la Constitution ou dans la loi électorale l’interdiction d’accès à des charges publiques à toute personne qui s’y livre en tant que auteur ou relayeur (se).
On peut le dire avec assurance : bien des compatriotes ont des idées dans le sens d’améliorer le contenu de la loi fondamentale. Ils en ont l’occasion via le Dialogue national.
Chaque dialogue a sa dynamique
Cela étant, la livraison actuelle de « BALISES » est plus une exhortation aux évidences qu’un plaidoyer pour un camp politique donné.
Inutile de nous livrer à la politique de l’autruche : le contexte actuel concourt à un Dialogue au cours duquel il sera impossible, mais alors impossible, de contourner la ré-visitation de la Constitution.
Moralité : les protagonistes réels et potentiels doivent s’y préparer !
Après Massad Boulos l’américain, Maxime Prévot le belge, Bintou Keita l’onusienne a sonné le tocsin.
Aux uns et aux autres de se préparer en conséquence…
Nous ne voyons pas des forces politiques et sociales invitées au Dialogue national sortir de la salle parce que dans le calendrier des travaux est prévue la ré-visitation de la Constitution !
*Omer Nsongo die Lema*
@omernsongo
E-mail : omernsongo2@gmail.com
Facebook : Omer Nsongo
Tél./WhatsApp : +243993833277
