Evgueni Prigojine, patron du groupe paramilitaire russe Wagner, est décédé hier, en Russie. Il était parmi les passagers d’un avion qui s’est écrasé dans la région du Tver.
« Le nom de Prigojin figure sur la liste des passagers de l’avion qui s’est écrasé dans la région de Tver », a annoncé l’agence de presse russe Tass, citant l’agence fédérale de transport aérien russe. Il s’agit d’un avion privé de marque brésilienne Embraer (Empresa Brasileira de Aeronáutica), parti de l’aéroport de Sheremetyevo, à Moscou, pour Saint Petersburg. « Selon les premières informations, les dix personnes à bord de l’avion sont décédées », a précisé Tass.
De la geôle aux cercles d’influence
Né le 1er juin 1961 à Léningrad, l’adolescent Prigojine aurait passé une décennie en prison pour délinquance et cambriolage, dévoilent les archives judiciaires russes. Il en ressort et devient un des ‘‘nouveaux riches’’ qui ont tiré profit de la dissolution de l’Union Soviétique. Cet oligarque fait fortune dans le secteur de la restauration, et se rapproche des cercles d’influence économique et politique.
Il cofonde, en 2014, l’organisation paramilitaire Wagner. Elle avait pour objectif d’assurer la défense des intérêts extérieurs de la Russie. Le groupe a, cependant, acquis une renommée de ‘‘mercenaires’’, et a étendu son influence jusqu’en Afrique. La présence de Wagner est en effet signalée en Centrafrique et au Mali, et ses agents seraient actifs au Burkina Faso et au Soudan.
La guerre en Ukraine et la disgrâce
Très impliqué dans la guerre russo-ukrainienne, Prigojine a acquis une notoriété médiatique supplémentaire due à ses critiques virulentes à l’endroit de l’état-major russe, dont il n’approuve pas la stratégie. En juin dernier, les discordances avaient atteint un niveau tel que les troupes de Wagner ont engagé une rébellion contre l’État russe.
Indigné par cette volteface, le président Russe, Vladimir Poutine, avait traité Evguéni Prigojine de ‘‘traître’’, sans toutefois le nommer. Un compromis était trouvé pour sortir de cette crise, avec l’implication du président biélorusse Alexandre Louacheno. Un accord a permis au ‘‘traitre’’ de se réfugier en Biélorussie.
Au début du mois de juillet, le président Loukachenko déclarait que Prigojine se trouvait en Russie et non au Biélorussie comme le voulait l’accord ayant mis fin à sa rébellion. « Nous ne suivons pas ses mouvements », avait réagi le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.
La pièce est jouée !
Ainsi s’en est allé celui qui, il y a deux jours, se serait affiché quelque part en Afrique, dans une vidéo, et déclarait « faire grandir la Russie sur tous les continents ». Et, alors que les enquêtes continuent, la nouvelle de son décès suscite déjà des réactions de toutes sortes. « Je ne sais pas encore tout à fait ce qui s’est passé, mais je ne suis pas surpris », a déclaré le président américain Joe Biden.
« Le chef du groupe Wagner, héros de la Russie, véritable patriote de sa patrie, Evgueni Prigojine, est décédé des suites des actions de traîtres à la Russie», affirme un compte Telegram attribué au groupe Wagner.
Alors que cet Embraer s’abimait au Nord de la Russie, le président Russe se trouvait dans le Sud-Ouest, où il a prononcé un discours à l’occasion du 80ème anniversaire de la bataille de Koursk, une des batailles de la seconde guerre mondiale. Faisant référence à la guerre en Ukraine, il a salué le dévouement à la patrie et la loyauté au serment militaire de ses soldats, sans aucune référence au sort de Prigojine.
Prosper Mbumba
Journaliste indépendant (depuis Liège)