A l’Université de Kinshasa, réputée comme étant la Colline inspirée, le débat autour de la révision voire du changement de la Constitution, en RD. Congo, a revêtu hier, mercredi 4 décembre 2024, une dimension académique à l’occasion d’une grande conférence tenue, du côté de la Faculté de Médecine, précisément, dans la salle Monekoso. ’’L’ordre constitutionnel face aux mutations de la société : du populisme au discours académique’’, telle était la thématique abordée lors de cette activité scientifique. Les professeurs désignés comme étant des panélistes ont marqué l’évènement par la pertinence de leurs points de vue et l’objectivité de leurs analyses, préconisant l’avènement d’un nouveau mode de gouvernance en RDC, adapté aux besoins pressants des populations. Sans langue de bois, ils ont souligné, devant l’assistance, constituée des étudiants venus de différentes facultés, la nécessité, pour tous, de soutenir, massivement, l’initiative du changement de l’actuelle Constitution de la République, promulguée en février 2006, pour marquer la rupture avec un passé corrompu et poser les bases d’une renaissance véritable de la République démocratique du Congo.
Dans leur élan, les Professeurs Félicien Tshibangu, Christian Kabange, Grâce Muwawa et Camille Ngoma, tous membres d’un groupe de recherches multidisciplinaires, ont proposé, eux-mêmes, des améliorations nécessaires dont la Commission annoncée, par le Chef de l’Etat, pourrait, au moment de sa mise en place, l’année prochaine, tenir compte, pour produire un travail aux résultats appréciables.
Lors de son intervention, le Professeur Grâce Muwawa a souligné plusieurs réformes à opérer. Il a proposé notamment la modification des articles 2, 5, 10, 13, 68, 70, 71, 77, 78, 81 et 217 de la Constitution actuelle. Parlant, par exemple, de l’article 70, il suggère que le mandat présidentiel soit de sept ans non renouvelable. Grâce Muwawa soutient également la révision de la disposition relative à la nationalité congolaise, au niveau de l’article 10. Plus loin, lors de la conférence, il a exprimé son accord pour la suppression du Sénat, insistant, vivement, sur la mise en place d’un Parlement monocaméral en RD. Congo.
‘’ La pratique du droit, c’est aussi confronter continuellement ses acquis intellectuels aux questions les plus importantes de l’actualité socio-politique et juridique de pays. Elle provoque continuellement l’auto-remise en question qui fonde, par ailleurs, la gloutonnerie d’une constante auto-mise à jour propre à chaque citoyen qui se veut un digne scientifique de son pays. L’enseignement universitaire ne devrait pas ressembler à ce discours monologue d’un pseudo prophète de la loi imposée aux pauvres spirituellement malheureux. Il n’en est un que lorsqu’il permet de résoudre les vrais casus de la vie professionnelle. Le débat et la controverse y sont inhérents, surtout lorsqu’on n’y présente pas ses galons en lieu et place des idées’’, a soutenu, dans son intervention, le Professeur Grâce Muwawa.
Lors de son exposé, le Professeur Camille Ngoma a, pour sa part, énuméré aussi une série d’insuffisances à redresser dans une nouvelle Loi suprême. Il a soutenu la suppression du Conseil supérieur de l’audiovisuel et de la communication (CSAC), du Conseil économique et social qu’il juge, à la fois, stériles et budgétivores. Le Professeur Ngoma voudrait également que les Gouverneurs de province soient élus, par le peuple, au suffrage universel direct, comme c’est le cas pour le Président de la République, et non pas par les élus provinciaux, pour mettre, définitivement, une croix au clientélisme, à la corruption et, même, au gaspillage des moyens de l’Etat.
Vivement un débat constructif autour de la Constitution
Au moment de son intervention, le Professeur Félicien Kalala a encouragé les congolais à une analyse réaliste de la situation. Même son de cloche pour Christian Kabange, qui pense, fermement, que le moment est arrivé pour élever le débat autour de la Constitution.
‘’Le contexte se prête bien. En tant que juriste, c’est normal qu’à un moment, on puisse réfléchir sur les questions qui se posent. Il était question de réfléchir sur l’adéquation entre l’ordre constitutionnel et les mutations sociales. Cela nous a amenés à discuter de la question brûlante de l’heure en rapport avec la révision ou le changement de la Constitution. L’accent a été mis sur la nécessité d’élever le débat. C’est vrai que le débat populiste est important, mais, à un moment, il faudrait élever le débat au niveau académique pour arriver à voir les perspectives en respectant la liberté académique. J’aimerais faire une distinction entre ce qui relève des questions d’opinion qui peuvent diviser les politiciens. Mais, la réalité, du point de vue technique, c’est qu’une Constitution n’est jamais statique. Lorsqu’on parle des mutations sociales, c’est-à-dire que la Constitution doit toujours être en adéquation avec les contextes politique, économique et social. Une Constitution, même si elle serait la meilleure du monde, a toujours des choses à changer. Des gens pensent qu’il faut aller par une révision, d’autres pensent qu’il faut aller par un changement, d’autres encore pensent que le contexte ne s’y prête pas. Le plus important à retenir est qu’une Constitution n’est jamais statique. Elle doit subir des évaluations à un certain moment pour voir ce qu’on peut améliorer ou changer’’, a indiqué le Professeur Christian Kabange, face à la presse, au terme de l’activité.
La Pros.