(Par le Professeur Patience Kabamba)
L’aspiration de toute personne humaine est de vive dans une société dans laquelle elle serait libre et heureuse. Il s’avère que pour atteindre ce type de société, il faut passer par des crises permanentes. Car, le bonheur et la liberté ne s’obtiennent souvent qu’en rompant avec la tradition de soumission ou règnent des arguments d’autorité. Des crises et des guerres dans notre pays sont souvent motivées par l’illégitimité représentative des pouvoirs en place. On a l’impression que la jouissance du peuple est confisquée par celui qui s’accapare du pouvoir de manière illégitime. Les seuls à avoir été élus légitimement dans notre pays, demeurent le premier Président Joseph Kasa-vubu et le Premier Ministre Patrice Emery Lumumba.
En dehors de ces deux-là, tous les autres sont arrivés au pouvoir par coups d’Etat. Le coup de force de Mobutu avait eu lieu, d’abord le 14 septembre 1960 lors de la neutralisation du Président de la République et du Premier ministre, consécutif à la révocation et à leur destitution réciproques ; ensuite en novembre 1965 lorsque Mobutu accéda au pouvoir. Il s’en est suivi celui de Laurent Désiré Kabila le 17 Mai 1997.
Joseph Kabila a hérité de ce pouvoir en 2001. Ici, il s’est agi d’un coup d’Etat constitutionnel. Car, la succession dynastique dans une République n’était pas prévue dans la Constitution de la république démocratique du Congo voire dans la loi 003 instituant le pouvoir de l’AFDL. Enfin le dernier coup d’Etat peut être considéré comme « démocratique ».
En ce sens que la personne massivement élue n’a pas pris le pouvoir. Il a été substitué et remplacé, à la suite d’un deal, par une autre personne suite à ce que Yves Le Drian, Ministre français des Affaires étrangères, a qualifié d’un ‘’compromis à l’africaine’’.
Le MDW de ce weekend argue que l’histoire a du sens et elle a un sens. Tout doucement, la République démocratique du Congo avance vers l’aspiration la plus profonde de son peuple, à savoir celle de vivre dans une société dans laquelle ils seraient libres et heureux. Ce sens de l’histoire informe la totalité des crises que le pays traverse.
Dans ce sens, il existe un déterminisme historique que je qualifie de révolutionnaire. De crises en crises, le peuple congolais purifie son désir, son aspiration de se défaire de tous ceux qui déstructurent sa vie. Nous avançons vers de lendemains où la crise de légitimité ira toujours décroissante. C’est le sens de l’histoire déterministe, elle avance vers quelque chose de plus acceptable. C’est cela que j’appelle le déterminisme révolutionnaire. Le temps se donne comme objectivité déterministe d’une signification de sens à vivre pleinement.
Il en est de même du détournement des deniers publics qui est devenu une pratique banalisée de nos jours au Congo-Kinshasa. A travers des procès contre des Congolais détourneurs de l’argent du peuple, petit à petit nous avançons vers cette aspiration d’une société un peu plus honnête.
Cependant, pour l’instant, les procès sont encore sélectifs et la justice est subordonnée au pouvoir. Mon hypothèse est que le temps historique de l’ensemble travaille à une historicité plus heureuse et avance vers un déterminisme révolutionnaire.
Le déterminisme historique n’est pas mécanique, mais plutôt dialectique, cela signifie que nous allons encore passer par des crises à l’instar de celle qui se profile à l’horizon, celle d’un retour au pouvoir des anciens dirigeants. Mais le peuple fera encore face à cette crise avec une intensité dialectique supérieure.
En fait, il convient de rappeler que le développement historique repose sur le fait que la crise la plus récente considère les crises passées comme des étapes conduisant à elle-même.
De crises en crises, une restructuration supérieure s’opère même dans les mentales du peuple. La crise finale sera la crise de l’impossibilité de la reproduction des voleurs des deniers publics, de l’impossibilité d’accéder au pouvoir par des voies illégitimes.
J’aimerai à ce niveau définir ce que j’entends par peuple. Le mot peuple est galvaudé. Au nom du peuple, on commet beaucoup d’injustice et de bévues. Tous les dirigeants prétendent servir le peuple, alors qu’en réalité ils se servent du peuple pour s’enrichir individuellement. Le peuple est donc celui sur qui le pouvoir s’exerce. Je ne considère pas la classe politique comme faisant partie du peuple.
Le peuple est celui qui se bat pour son émancipation. Le peuple est la victime de cette histoire de coups d’Etat et de confiscation du pouvoir par des moyens illégaux. Le peuple subit et produit en même temps ce pouvoir. Le peuple subit ce pouvoir parce qu’il est le terreau sur lequel reposent ces coups d’Etat et les détournements de ce qui lui appartient. Le peuple est aussi complice parce que la reproduction des coups d’Etat est l’œuvre de son apathie légendaire.
Cependant, le MDW aujourd’hui est optimiste dans la marche historique déterministe et révolutionnaire. Nous avançons vers des lendemains meilleurs.
Qu’est-ce qui me fait croire à la dialectique du déterminisme révolutionnaire ? Pourquoi voulons- nous vivre dans une communauté de bonheur et de liberté ? C’est parce que nous en avions déjà fait l’expérience dans un passé lointain : comme humain nous avons expérimenté la volupté, le vrai bonheur.
Et tout le reste de notre vie est à la recherche pour retrouver cette communauté de l’être perdue. Aujourd’hui nous sommes dominés par la société de l’avoir qui détruit notre désir.
Le capital a tout détruit sur notre route. Il a détruit notre avenir, notre sexualité, notre raison d’être. Mais, il y a une chose que l’argent n’a pas pu toucher. Sur la rue de N’Djili, deux regards se croisent dans un désir infini d’amour et de volupté. Ce désir-là, rien ne peut le toucher, ni l’argent, ni aucune fortune ne peut le détruire l’amour qui habite en nous. Lorsque vous faites des cadeaux à votre copine, vous la choyez avec des cadeaux et du luxe.
Mais, vous ne la respectez pas, vous l’insultez en public, elle va surement vous abandonner. Car, la dignité et l’amour n’ont aucun prix. Ils ne peuvent pas être achetés par le capital. C’est cela qui me fait dire que nous avançons vers des lendemains révolutionnaires.
D’autant plus que l’amour demeure, en définitive, révolutionnaire. Il voit toujours plus loin. Il y en a nous un désir infini d’amour et de jouissance qui travaille positivement et nous conduit vers l’automouvement dialectique qui nous fait vouloir une société de liberté, de bonheur et de volupté.
C’est le véritable sens du déterminisme révolutionnaire qui conduit notre histoire. C’est un déterminisme dialectique et historique !
