« Prêtre, théologien et historien des religions, je ne ferai jamais la propagande d’un politicien ni d’un parti politique ; je resterai « au milieu du village », prêt à voter pour ceux que je crois pouvoir faire progresser le bien-être des congolais, et donner à notre peuple des raisons d’aimer leur pays, de se dépenser pour son essor, et d’espérer en son avenir.»
Le 1er septembre, dans une lettre adressée au bureau permanent de la CENCO, l’Abbé Kabasele-Lumbala François a émis des mises en garde contre l’esprit mondain et politicien qui tente de s’ériger au sein de l’Eglise.
En effet, il est revenu sur plusieurs propos tenus par le Cardinal Ambongo et Mgr Nshole allant dans l’ordre de recadrage des institutions politiques de la République. S’il reconnait le droit et même le devoir de l’Eglise de contribuer aux efforts de redressement et de la construction de la cité terrestre, il a fermement condamné la tendance actuelle de gérer l’administration de la cité. «Nous ne devons pas tolérer que le bureau permanent de la CENCO devienne une structure de contrôle du fonctionnement des institutions de la République, qu’il se mette à donner des leçons au Parlement de notre République comme si c’était un groupuscule d’ignares, qu’il se charge de juger les magistrats et de déterminer la marche de la CENI ! Un tel agissement est une insulte publique à nos institutions, même si ces dernières n’ont pas atteint leur vitesse de croisière. Selon la doctrine sociale de l’Eglise catholique, le secteur de la « mission séculière » pour la gestion du temporel en conformité aux valeurs évangéliques, incombe aux laïcs chrétiens. »
Reconnaissant que le président actuel n’est pas parfait, il a tout même réprimé les paroles et actes visant à répandre la haine à son égard au sein de la société et dans les assemblées liturgiques. Pour lui, cela n’est ni plus ni moins que la profanation du culte chrétien et de l’Eglise. Pour lui, il est inadmissible de trouver des propos à caractère tribal au sein de l’Eglise, ce qui amènerait à revivre certains scénarios amères qui ne contribuent pas au développement du pays. Il a rappelé que les pasteurs sont appelés à l’amour. Il est de ce fait contradictoire que ceux-ci expriment ouvertement leur haine envers le président de la République en exercice et des fonctionnaires de l’Etat: « Il y aurait aussi à dénoncer des relents de tribalisme dans les propos du secrétaire général de la CENCO, quand il répand des rumeurs tribalistes discréditant les institutions de la République ! Selon lui, la CENI serait prise en otage par une tribu de la République, celle de son président Kadima ! C’est à se demander si, dans les prédictions de Mgr Nshole, il n’y aurait pas quelque scénario d’une réédition de multiples exodes luba depuis l’indépendance, scénario d’un retour au quota dans les universités et la fonction publique qui avait jadis amené plusieurs Luba à changer de noms et d’identité ethnique pour subsister ? Le spectre de l’épuration ethnique de 1990 s’agite à nouveau, et ce n’est pas un rêve : à l’annonce de la victoire de Tshisekedi au scrutin de 2018, souvenons-nous que des pillages de certaines parcelles et des massacres de quelques ressortissants de la tribu stigmatisée ont eu lieu à Kinshasa ; ces désordres étaient alimentés, entre autres, par des allégations relatives à la fameuse «vérité des urnes», clamées en chaire et réitérées, de Monseigneur Nshole et du cardinal Ambongo. La banalisation du discours ainsi que la reprise des stéréotypes contre une tribu est un crime, car elle sème des germes d’une guerre civile et mine la cohésion d’une société. Un pasteur chrétien ne sème jamais la haine, mais la paix et la communion ; ses propos ne doivent pas faire le lit d’un éventuel « leader courageux » qui profiterait du chaos créé au pays en vue de prendre le pouvoir par les armes et de tirer son épingle du jeu politique. »
S’appuyant sur les opinions du Cardinal Ambongo et Msgr Nshole, il a insisté sur le fait que leurs opinions ne sont en aucun cas celles de l’Eglise catholique de la RDC car le cardinal au Congo ne représente pas l’Eglise catholique mais plutôt l’archidiocèse de Kinshasa et Mgr le secrétaire général de la CENCO est sous les ordres de l’évêque (actuellement Mgr Utembi) qui est président de la CENCO et duquel il devrait recevoir les ordres pour des déclarations relatives à ces sujets qui n’ont pas été débattus dans les assemblées.
Pour lui, chaque citoyen patriote devrait soutenir le processus électoral entamé depuis 2022 et qui touche bientôt à son terme devrait être soutenu et non boycotté et ce, malgré certains manquements afin de maintenir le pays stable. Il a rappelé que l’histoire de toutes les démocraties est jalonnée par des failles qui sont corrigées au fur et à mesure que les administrations mûrissent, rappelant que la RDC vient de 50 années de régimes militaires. Celles-ci n’ont pas connu d’élections véritables et pourtant à ce jour, quelques progressions sont à signaler et « ce n’est pas le moment de saper les efforts de la CENI précédente et actuelle, si nous aimons réellement notre pays, surtout en ce moment où il est infiltré à plusieurs niveaux, attaqué par des voisins et des prédateurs internationaux».
Déborah Nitu