Le Partenariat pour les forêts du bassin du Congo (PFBC) organise deux grands évènements à Kinshasa, à savoir, du 31 mai au 1er juin, le Forum de la Jeunesse pour les Forêts d’Afrique Centrale 2024 et, du 3 au 5 juin 2024, la 20ème Réunion des Parties du partenariat. Parmi les protagonistes de ces deux évènements se trouve Damase Khasa, un digne fils du pays, sur qui nous faisons un coup de projecteur.
Docteur en sciences forestières depuis 1993, Damase Khasa est professeur à la faculté de foresterie, géographie et géomatique de l’Université Laval au Canada. Avec une spécialisation en génécologie forestière et génétique des populations (des arbres), il est chercheur en agroforesterie, biotechnologies de symbioses végétales, écologie moléculaire et génomique environnementale, et sylviculture en région tropicale – entre autres. Il est membre de plusieurs sociétés savantes dont le Centre d’Etude de la Forêt (CEF), l’Institut de Biologie Intégrative et des Systèmes (IBIS), le Groupe Interdisciplinaire de Recherche en Agroforesterie (GIRAF), et il a été Directeur des projets de Formation en Gestion des Ressources Naturelles dans le Bassin du Congo (FOGRNBC et PEFOGRN-BC), de 2008 à 2022.
De la forêt du Mayombe au Canada
Né à Phelele dans le Mayombe (Kongo central), Damase Khasa Phambu a fait son école primaire entre Phelele, Vemba di Vungu (à quelques kilomètres du Petit Séminaire de Mbata Kiela), et l’Ecole Primaire de Kangu. Ensuite il a fait les humanitaires scientifiques à l’Ecole Secondaire de Kangu. Cette base assurée par les missionnaires de Scheut l’a conduit jusqu’à Laval en passant par l’université de Kinshasa où il obtient un diplôme de graduat en Chimie-Biologie en 1980.
Les conflits qui opposaient alors le président Mobutu aux étudiants obligèrent le jeune gradué d’arrêter ses études. Il s’en alla enseigner au Lycée de Kangu, mais n’y fit pas longtemps. Il fut ‘‘repêché’’ de là par une bourse qui lui permit de faire un baccalauréat en génie forestier à l’université Laval jusqu’en 1984. Cette même année il revint à l’université de Kinshasa comme assistant. C’est alors que, « pour rallier la théorie à la pratique », précise-t-il, il fonda à Nsioni (Mayombe), en 1985, l’ONG Centre d’Encadrement des Paysans (CEP), une structure qui accompagne les populations rurales en vue d’un meilleur usage des ressources locales.
Une autre bourse le ramena au Canada pour une maitrise en biotechnologie forestière, avec une étude de l’utilisation de symbiose racinaire pour les plantes tropicales. Ce qu’il explique en ces termes : « on nous a toujours dit que les plantes se nourrissent par leurs racines. Pourtant au-delà de ces poils absorbants (racines) se trouvent des champignons qui absorbent tous les éléments nutritifs dont la plante a besoin.
Les plantes se nourrissent donc par les champignons symbiotiques qui sont associés aux racines. Il y a symbiose entre les racines et les champignons ; il s’agit d’une association mutualiste, parce que les deux profitent l’un de l’autre ». L’objectif de l’étude était de voir comment la valorisation de ce mécanisme naturel pouvait aider à se passer de l’utilisation des engrais chimiques, précise-t-il.
Sa thèse de doctorat a porté sur un test de provenance et une sélection d’acacias les plus productives. Ce travail de génétique forestière réalisé au plateau de Bateke devait conduire à la distribution d’acacias à travers la RDC. Cette plante d’origine australienne est arrivée au Congo vers les années septante, à travers le ministère de l’environnement. Ce dernier avait initié un projet visant à planter 100.000 hectares d’acacias en vue de fournir de l’énergie bois pour les ménages non électrifiés. Comme légumineuse, l’acacia aide aussi à enrichir le sol en azote et en matières organiques.
Damase Khasa, grand diplômé
Le 8 mars dernier, le Professeur Damase Khasa était nommé Grand diplômé dans le cadre de la reconnaissance ‘‘Les Remarquables’’ de la Direction de la philanthropie et des relations avec les diplômées et diplômés de l’université Laval. Il s’agit d’une reconnaissance des professionnels qui se démarquent par leur contribution exceptionnelle à l’université Laval.
Cette université reconnait ainsi les mérites du professeur Damase Khasa qui a, à l’échelle mondiale, fait preuve de leadership sur le plan du développement des connaissances en agroforesterie, en foresterie internationale et en restauration écologique des écosystèmes dégradés.
« Professeur à l’Université Laval depuis 2001, Damase Khasa a notamment mis sur pied un programme d’éducation internationale permettant aux étudiantes et étudiants de la Faculté de foresterie, de géographie et de géomatique de l’Université Laval de participer à des missions dans 16 pays répartis sur 4 continents. Il a également dirigé le programme de maîtrise en agroforesterie à l’Université Laval de 2004 à 2019, tout en pilotant la création d’un microprogramme à distance en agroforesterie », disent les remarques publiées par l’université Laval à l’occasion de cette nomination.
Ces mêmes remarques mentionnent également la mise en place, avec une contribution majeure du professeur Damase Khasa, d’un programme de formation universitaire et professionnelle (depuis 2008), qui appuie la formation en gestion des ressources naturelles dans le bassin du Congo. Avec ce programme, « en RDC par exemple, le plus grand pays forestier du continent africain, plus de 500 jeunes ingénieurs forestiers ont été formés localement, dont plus de 30% de femmes, et une dizaine de professeures et professeurs ont été formés à l’Université Laval dans le cadre de ces projets ».
PFBC à Kinshasa
Le Partenariat pour les forêts du bassin du Congo est une initiative à but non lucratif visant à promouvoir la conservation et la gestion responsable des forêts tropicales du bassin du Congo. Le projet vise à améliorer les techniques et le partage d’informations des organisations impliquées. Dans ce cadre, le Forum de la Jeunesse pour les Forêts d’Afrique Centrale 2024 réunit, ce 31 mai et 1er juin, à Kinshasa, 150 jeunes d’Afrique centrale et d’Europe, engagés sur les enjeux de protection des forêts et de préservation de l’environnement. La RDP 20, quant à elle, est organisée par la Co-Facilitation des Républiques Française et Gabonaise du Partenariat pour les Forêts du Bassin du Congo (PFBC).
Prosper Mbumba
Journaliste indépendant