(Par OSONGO-LUKADI Antoine-Dover, Docteur en philosophie et Lettres
Professeur d’Universités)
⦁ Quand l’infantilisme et le déshonneur sont en mission
C’est en lisant, entre autres, la tribune concoctée par Kakusu Jean D’arc Campbell professeur de son état, intitulée « Un corps sans cœur ni âme » (cfr Réseaux sociaux), que nous nous sommes décidé de réfléchir davantage encore sur les faits et causes sur une certaine cacophonie qui a élu domicile dans et autour de la gouvernance de la RDC.
Pourquoi malgré les efforts que déploie le président de la République au niveau national et international, son action à la tête de l’Etat a du mal à convaincre plus d’un opposant ou d’un quelconque partisan, il y a toujours comme un doute, un scepticisme ? Cet enseignant qui revient comme invité de la dernière Assemblée des Nations-Unies semble avoir trouvé des réponses grandeur nature à notre préoccupation.
Il écrit : « J’avais écrit que le Congo n’existe pas, utilisant une métaphore le comparant à un corps sans âme ni cœur, un corps qui respire à travers à travers une machine parce qu’il n’a pas la force de respirer par lui-même ». Pour convaincre, Kakusu Jean explique comment « Mon frère, l’honorable Bienaimé Nyamangyoku, a réagi, ce qui n’est pas dans sa nature. Peut-être qu’en tant que nationaliste, il a trouvé cette métaphore un peu dure, car selon lui, le Congo existe ».
Pourtant, « Je suis à l’Assemblée générale des Nations Unies, où la délégation congolaise était l’une des plus importantes au monde en quantité. Il y a des centaines de personnes présentes, mais à chaque conférence ou session à laquelle j’ai assisté, le siège du Congo était vide, même lorsque le Congo était au cœur des discussions. Les rares fois où j’ai croisé des membres de leur délégation, c’était des restaurants ou des magasins à New-York, où ils étaient faciles à identifier ».
Flambeurs par essence et reconnaissables partout et nulle part ailleurs, car irréfléchis, irrationnels, bouillants, irresponsables, bénéficier de la chance de représenter leur pays est juste et simple occasion de frimer, de verser dans la démesure financière, économique, libidinale. Impossible de retenir l’homme congolais. Il est sans frein.
Pourtant, « Aimer le Congo, explique Kakusu, signifie aller au-delà des émotions superficielles et commencer à vraiment aimer le pays, au lieu de se contenter d’un nationalisme aveugle. Aujourd’hui, je peux réitérer ce que j’ai dit à mon frère l’honorable Nyamangyoku : le Congo n’existe pas. Il y a de la dysfonction et un désordre terrible qui apportent la honte ; il y a un amateurisme à un niveau difficile à expliquer. Ici j’essaie de parler avec modération, car j’ai assisté à des réunions où c’était encore pire ».
Pour Kakusu, « Le pays va mal, mes frères et sœurs, et la situation est préoccupante. Mon expérience à New-York m’a donné envie de pleurer. J’étais frustré et outré, car même des pays comme le Soudan du Sud ou la Somalie étaient bien représentés, à l’inverse du Congo » ; Pire, « Le seul jour où j’ai vu la délégation congolaise dans une certaine forme d’ordre, c’était lors du discours du président Félix.
Avant ou après ce discours, les membres de la délégation buvaient, mangeaient et s’engageaient des activités de trafic d’influence, sans servir le Congo ni ses intérêts, ce qui est triste ». De telle sorte qu’« Au cours de mes cinq jours là-bas, j’ai observé un Congo en coquille, sans cœur ni âme. Une délégation aux Nations Unies dépourvu d’experts ou de ressources adéquates pour défendre les intérêts de notre pays. C’était déconcertant de constater une telle absence de préparation et d’engagement ».
Et « Chaque fois que le Congo était mentionné, regrettait amèrement Kakusa, je ne pouvais m’empêcher de ressentir une profonde tristesse, car il semble que nous manquions d’une véritable vision et d’une direction. Les autres nations, même celles traversant des crises, parvenaient à se faire entendre grâce à des représentants compétents.
En revanche, notre délégation paraissait désorganisée, dispersée et dépourvue de stratégie claire ». Or, « L’amour pour notre pays devrait nous pousser à agir avec un peu de conscience. Il y a toute une nouvelle génération d’élites irresponsables et inconscientes qui se développe au Congo, ce qui est très dangereux pour le pays et sa réputation dans la famille des nations ». Autrement dit « Trente ans de guerre, d’humiliations et de souffrances, clôture Kakusa, qui ne devraient pas être le lot d’une des nations les plus riches naturellement mais pauvre dans son esprit, ne nous ont rien appris. Le Congolais vit encore sous l’emprise de l’émotion, d’une passion et d’un fanatisme aveugles. Les gens défendent l’indéfendable.
A l’Assemblée générale des Nations Unies, j’ai vu une coquille, un corps sans cœur ni âme, un Congo inexistant, absent et désorganisé. J’ai vu des touristes venus pour les plaisirs, prenant des photos pour Facebook et Instagram, et non des experts pour défendre le Congo. Le Congo était inexistant » (fait de citation).
Cette description des faits correspond très bien à nos efforts déployés dans nos publications scientifique et médiatique de pouvoir inculquer à l’homme congolais une culture plus épistémologique et praxéologique. La culture épistémologique concerne la réflexion, le raisonnement tandis que la culture praxéologique implique l’éthique, la morale. Le Tabloïde « La Prospérité » journal du brillant journaliste Marcel NGOYI KYENGI nous a rendu un service inestimable dans la diffusion et la propagation de cette quête et la formation de l’idéologie philosophique dénommée « remplacisme-culturaliste-transformatrice », se résumant dans la capacité créatrice, productrice, inventrice de tout être humain quelle qu’en soit sa race, son origine pour son développement et sa transformation.
Malheureusement malgré le journal la Prospérité et les revues scientifiques, entre autres, la Revue Africain du Savoir déposée à la Bibliothèque Royale Albert 1er de Belgique et la Revue Pensée Agissante de l’Université Saint Augustin de Kinshasa, cette idéologie reste encore lettre morte, car elle n’intéresse aucun politique congolais, alors qu’elle est la clé du développement et de la transformation holistique du Congo-Kinshasa, mais elle est déjà en cours dans les Etats membres de l’AES !
⦁ Constant Mutamba derrière et maître du temps ou Monsieur « the time is money »
Nous venons récemment de consacrer une tribune à Constant Mutamba (Journal la Prospérité, Série I, n° 6404 du vendredi 23 août 2024- 24ème Année), où en sa qualité de Ministre de la justice et Garde des sceaux, nous avons mis en lumière sa capacité créatrice, productrice, inventrice, et davantage encore combien il répondait à toutes les qualités d’un vrai et grand « remplaciste-culturaliste-transformateur ».
Cependant et à écouter le Professeur Kakusa, c’est comme si Félix Tshisekedi était ou devait être un magicien, qui devait tout deviner pour savoir qui ou qui tel ministre ou tel responsable politique l’accompagnant à l’Assemblée général des Nations Unies emmènerait à ses assises mondiales. L’homme congolais est déliquescent, désordonné par nature. Ce n’est pas Félix Tshisekedi qui le civilisera ou lui donnera en cinq ans une conscience politique fondamentale. Mobutu, Mzee Kabila, Raïs Kabila avaient essayé, sans jamais y arriver et quitté le pouvoir en pleurs et déçus de s’y être cassé les dents sur cet homme pas comme les autres.
Ce n’est pas le fait d’accéder au poste de ministre, de député, de sénateur, de gouverneur qui change un imbécile ou un délinquant. Imbécile, délinquant, on l’est et on le reste, car c’est dans sa nature propre et intime.
C’est pourquoi contre toute proportion gardée, en dépit des aléas du pouvoir, des difficultés structurelles liées à la gestion quotidienne de ses responsabilités, le président Félix Tshisekedi a certainement accompli plusieurs réalisations au plan politique, économique, social ; bref culturel.
En tant que professeur d’universités, et à titre d’illustration, nous serions ingrats et indigne de ne pas reconnaître ou tout au moins signaler, parmi toutes ses innombrables réalisations sociales, culturelles, politiques, économiques, la couverture médicale universelle en soins de santé gratuits accordée aux professeurs de la RDC. Même si nos salaires restent précaires voire humiliants. Mais tout de même. Nous ne venons pas le réclamer. Ce n’est pas notre but ici.
Il s’agit en effet de montrer comment à cause de notre mauvaise gestion du temps et de notre inculture politique, nous n’arrivons jamais à joindre le niveau du développement et de transformation atteint par les pays développés et transformés voire ceux d’autres pays en voie de développement où les citoyens pétris des capacités créatrice, productrice et inventrice s’y donnent sans compter.
En cause notre obsession du pouvoir pour le pouvoir. Une obsession qui nous fait perdre énormément du temps. Cette obsession qui fait qu’on revienne souvent à la politique, qu’on ne parle que de politique alors que nous avons précédemment, en ce qui nous concerne, indiqué dans plusieurs de nos publications scientifiques et médiatiques, que le problème primordial du congolais n’est ni politique ni économique ni technologique, mais au contraire essentiellement culturel (civilisationnel, historique, mentaliste), autrement dit épistémologique et praxéologique, d’où effectivement et évidemment découlent tous les autres problèmes, que nous croyons ou pensons majeurs. Alvin Toffler est un auteur que nous admirons et citons souvent dans nos textes.
Parce qu’il est très pertinent. Parlant de pouvoir, découvrons ce qu’il écrit : « Dans toutes ses applications pratiques, la force est une quantité finie : il existe une limite au-delà de laquelle son emploi détruira ce que nous voulons conquérir ou défendre. Il en va de même pour la richesse : l’argent ne peut tout acheter, et il arrivera un moment où la caisse le mieux garnie se trouvera vide » (cfr Alvin Toffler, Les Nouveaux pouvoirs, Fayard, 1991, p. 38).
⦁ Choisir entre la balkanisation de la RDC et la révision constitutionnelle pour renforcer le pouvoir d’un individu où est la priorité et avons-nous le temps aujourd’hui ?
La question relative à la révision constitutionnelle et celui au dialogue inter-congolais, dans un pays en guerre comme la RDC, est non seulement irresponsable mais également et surtout une perte de temps. En effet qu’il s’agisse de la révision constitutionnelle ou du dialogue inter-congolais, chacun sait bien au départ qu’elle ne réglera rien et qu’elle n’aboutira logiquement à aucun résultat probant pour le peuple sinon qu’au partage des postes ministériels, car il ne s’agit que de garantir une richesse éternelle et constante aux groupes politiques qui ont décidé avec leurs familles biologiques, amis et connaissances d’asservir, de coloniser, d’esclavagiser le souverain primaire.
C’est une préoccupation que nous avons déjà étalée dans nos publications antérieures récentes où les charlatans, les jouisseurs, les danseurs impénitents étaient en train de faire perdre le temps au chef de l’Etat, mais également de le distraire avec des futilités d’ordre constitutionnel voire dialogal, pendant que l’opinion tant nationale qu’internationale l’attend au tournant quant à ses objectifs et à ses promesses distillées ci et là. Certainement que la bonne façon de faire perdre du temps au président de la République, c’est de l’embarquer dans le dialogue inter-congolais et/ou dans la révision constitutionnelle.
Schéma suicidaire dont on sait au départ, par expérience, qu’aucun chef d’Etat ne s’y était jamais sorti indemne de la vindicte ou de la résistance populaire. Qui a dit aux danseurs, aux délateurs, aux jouisseurs ou à ses soi-disant communicateurs que le fils d’Etienne Tshisekedi dormait nuitamment en pensant au troisième mandat ? Pour s’éterniser au pouvoir jusqu’à la fin des temps ?
Ces questions-là lui font perdre du temps. Le moment venu, et c’est notre conseil, le président de la République devait s’y assumer pour s’adresser à l’opinion tant nationale qu’internationale dans le but de fixer le cap et clarifier ses ambitions.
Le même Alvin Toffler, qui vient de montrer les limites tant du pouvoir politique que du pouvoir de l’argent, nous conseille de faire confiance au contraire au savoir. Ce n’est pas possible qu’autour du chef de l’Etat, au gouvernement, à l’Assemblée nationale, au Sénat et partout ailleurs, on ne respecte que le pouvoir et l’argent en défaveur du savoir.
Il s’agit pour les charlatans et compagnies de perdurer. Ils doivent pour ce faire monter et inventer n’importe quelle stratégie pour demeurer éternellement au pouvoir, pour rester assis aussi éternellement sur des malles d’argent. Mais songent-ils au président de la République, à sa vie, à son avenir ? Ils s’en foutent. Pourtant, nous venons de voir il y a un moment avec A. Toffler, que tout ceci n’est qu’éphémère.
Que le pouvoir, l’argent et la force liées à eux deux ne développent et ne transforment un peuple, un pays et ni encore moins ne forgent une nation. A. Toffler note ce qui suit sur le savoir, qu’il nomme une richesse infinie, « Le Savoir, lui, ne s’épuise pas : il nous est toujours possible d’en créer davantage » (A. Toffler, Les Nouveaux pouvoirs, Fayard, 1991, p. 38).
« Une autre différence intrinsèque, explique-il, sépare le savoir de la force physique ou de l’argent : en règle générale, si j’utilise un pistolet, vous ne pouvez en même temps utiliser le même ; et vous utilisez un dollar, je ne peux en même temps utiliser le même. Au contraire, nous pouvons tous deux utiliser le même savoir pour nous aider ou nous combattre – et, ce faisant, nous avons de plus une chance de produire un supplément de savoir. Ce seul fait suffit à montrer que les règle du jeu du pouvoir mené sur la base du savoir sont profondément différentes des principes auxquels se fient ceux qui prétendent arriver à leur but par la force et l’argent » (A. Toffler, Les Nouveaux pouvoirs, Fayard, 1991, p. 38).
Usons cohéremment du temps et du savoir, plutôt que du pouvoir, de la force et de l’argent pour développer et transformer la RDC. Dans le même ordre d’idées, les théoriciens du développement de l’Afrique, après avoir réfléchi les divers types de causes de son sous- développement et élaboré différentes stratégies pour sortir les Etats africains du sous-développement, se trouvent aujourd’hui dans une impasse face à un afro-pessimisme grandissant. Est –il possible de penser un autre paradigme du modèle de développement du continent noir afin de booster sa transformation et son développement durable dans un monde en mutation ?
Les Philosophes comme Marcien Towa ont préconisé une certaine « acculturation européenne » et déculturation africaine. Voie que nous qualifions d’herméneutique sodomisante (Osongo-Lukadi A.-D. ‘ Théorisation et Praxisation scientifique : Essai de refondation d’une ‘idéologie politique congolaise’ post-alternance historique, la transhumance, la stagnation ou comment déconstruire la souveraineté, in Revue Africaine du savoir, Vol. 10, No 10 , 2021-2022, p.7, cité dans le Cours de la Philosophie de la Culture, Master 1&2, Faculté de Philosophie, Université Saint Augustin de Kinshasa, Année Académique 2022-2023), et dangereuse, et de là, à la suite de Jean Paul Sartre, nous préconisons une doctrine existentialiste de la révolution. Cette révolution existentielle passe avant tout par une reconsidération culturelle. Car la culture est le fondement de la société, de la politique, de l’économie, de la technologie et de la science. En effet, le manque de culture conduit à un manque d’identité, de l’idéologie et à une pauvreté ontologique et anthropologique.
Le Pays comme la Chine, s’est développé par la culture. En moins de deux décennies, la Chine est devenue une référence en matière de développement. Ne partit de rien, elle est aujourd’hui adulée par les économies occidentales et Africains auxquelles elle n’a rien à envier.
L’Afrique peut s’inspirer du modèle chinois pour booster son développement. C’est-à –dire partir de sa culture pour booster sa transformation et son développement. Dans cette réflexion nous allons faire une analyse critique de Marc-Louis Ropivia dans son article Problématique culturelle et développement en Afrique noire : esquisse d’un renouveau théorique. Avec Marc-Louis Ropivia nous allons comprendre que la culture africaine n’est pas une aubaine déjà-là, le prête–à porter du développement mais présente à la fois des tares à surmonter et des valeurs à reconsidérer pour son développement durable.
Dans ce sens, deux articulations essentielles vont constituer le fil conducteur vers une nouvelle vision du devenir de l’Afrique à savoir la reconnaissance des « tares culturels africains » et la doctrine existentielle de la révolution qui prend en charge des valeurs culturelles africaines dans les différents modèles de son développement.
Les faits montrent, en dépit de tout et du tout qu’il y a des faiblesses culturelles que les Africains doivent surmonter pour prétendre au développement et à la transformation de leur espace-temps. Si bien que pour un développement et une transformation durable de l’Afrique les fondements de l’anthropologie africaine devraient constituer l’âme de tout programme de développement.
Le préalable est qu’il faut remédier en amont aux facteurs culturels du sous-développement avant d’envisager en aval les scénarios et stratégies du développement. En effet, le paradigme de l’impérialisme, avec son canevas théorique et conceptuel (centre-périphérie, échange inégal, dépendance), a constitué pendant plus d’un quart de siècle, en tant que facteur explicatif et causal du sous -développement, l’ossature de toutes les théories et réflexions sur le développement.
Son originalité est d’un côté d’avoir mis l’accent sur les facteurs historiques et exogènes qui culpabilisent l’Occident dans la production du sous-développement dans le Tiers- monde et de l’autre côté, ne jurer que sur ce dogme ‘en dehors de l’Occident point de salut, la tendance de penser que la France, les USA, tout comme l’Occident sont incontournables, l’Afrique ne peut ni créer, ni produire, ni encore moins inventer sans se référer au génie occidental européen.
Sans nier l’éclairage fondamental que ce paradigme a apporté dans la compréhension des origines du sous-développement, Marc-Louis Ropivia pense intégrer un nouveau paradigme, celui de la culture, en essayant de montrer aussi qu’il est aujourd’hui le poids des facteurs endogènes et des acteurs internes dans la perpétuation du sous-développement.
En d’autres termes, la question qu’il pose est celle de savoir si on ne décèle pas dans les sociétés, chez les peuples du Tiers-monde en général et de l’Afrique noire en particulier, des comportements, des attitudes et des carences plus nombreuses sinon aussi importantes pour faire perdurer le sous-développement que la spoliation économique que l’on a attribué à l’occident. En effet, seule une observation minutieuse de la gestion du temps dans les pays africains qui est le fruit de ses antécédents culturels que l’Afrique noire a besoin d’un véritable ajustement culturel, selon l’expression de Manguelle.
⦁ Que serait le développement (productivité) et la transformation (créativité, inventivité) sans une utilisation rationnelle et optimale du temps ?
Le développement est compris comme le produit d’un ensemble de performances nationales individuelles ou collectives résultant de l’accroissement de la productivité. Mais que serait la productivité sans une utilisation rationnelle et optimale du temps ?
La culture du temps est fondamentale au développement. Dans le champ planétaire et unifié de l’économie mondiale, dans le système moderne des relations internationales, il ne saurait y avoir de temps africain spécifique, singulier, sous le fallacieux prétexte que l’Afrique, en respectant ses valeurs culturelles, pourrait se développer à son propre rythme.
Marc-Louis Ropivia dresse un inventaire des quelques facteurs culturels qui constituent un obstacle au développement. Il affirme cependant de manière pertinente la problématique selon laquelle le sous-développement en Afrique est une ‘dysharmonie de trois systèmes horlogers : l’horloge biologique des citoyens, l’horloge socio-économique de la nation et l’horloge cultuelle des sociétés traditionnelles. Ces différentes horloges sont définies par des temps ou périodes d’activités.
Ces trois systèmes horlogers se présentent comme suit : Premièrement l’horloge biologique des citoyens. Selon lui, l’horloge biologique est celle qui rythme les fonctions ou l’activité métabolique et somatique de l’homme en tant qu’être vivant. Le temps biologique se caractérise par des périodes de veille, diurnes, durant lesquelles l’homme est censé exercer toutes sortes d’activités vitales.
Il se caractérise également par des périodes de sommeil, nocturnes, au cours desquelles l’organisme a besoin de repos. Le respect strict de cette alternance, activité/repos, est le fondement même de toute productivité socio-économique. Malheureusement dans les sociétés modernes, l’homme a perturbé son horloge biologique par toutes sortes de contretemps quotidiens qui sont autant de prolongements de la période de veille et de réductions de celle de repos ou de sommeil.
C’est particulièrement en Afrique noire, où les réjouissances (retraits de deuils, mariages, anniversaires) et les loisirs quotidiens (boîtes de nuit, discothèques) peuvent durer toute la nuit, que l’homme ne peut jouir, le lendemain au travail, de toutes ses facultés.
Contraint de se reposer le jour, par nécessité physiologique de récupération, il inverse progressivement son horloge biologique et amoindrit ainsi sa productivité, d’où retards, absences quotidiennes et faible rendement dans les lieux de travail. Deuxièmement l’horloge socio-économique de la nation. Selon Ropivia, c’est elle qui rythme l’ensemble des activités socio-économiques d’une communauté nationale.
Chaque nation obéit à des rythmes d’activités journaliers, hebdomadaires, mensuels, annuels ou saisonniers, liés à sa propre évolution technologique et qui, à l’intérieur des horloges planétaires universelles, fondent son harmonie interne et façonnent sa spécificité par rapport à d’autres nations. Ces rythmes d’activités subdivisent l’horloge socio-économique en temps : temps de travail, des loisirs, de repos et des services personnels.
Il est évident que la mauvaise gestion du temps de travail ralentit considérablement la productivité. Il y a d’abord les loisirs urbains quotidiens qui est le mimétisme de ce qui se passait dans les villages au clair de la lune, qui ruinent physiologiquement l’individu et ses capacités de travail. Du fait de l’ininterruption de certaines activités (puisqu’on peut danser et boire jusqu’au matin sept jours sur) par manque de réglementation dans la plupart des cas mais aussi par manque de conscience professionnelle à tous les niveaux de la pyramide administrative, la spirale de l’absentéisme pour cause de maladie devient donc hallucinante.
Les bureaux vont jusqu’à fonctionner avec un agent sur deux. En deuxième lieu, il faut dire que les temps des loisirs et de repos, qui était presque inexistant dans les sociétés traditionnelles africaines (congés annuels, week-ends, jours fériés), n’obéissent pas à une logique de relaxation, en raison aussi de l’absence de structures internes de vacances.
Néanmoins, il s’amorce ici un début de rythmes nationaux saisonniers, car de nombreux fonctionnaires préfèrent prendre leurs congés annuels durant la période des cultures. Aussi, à cause des bas salaires et de la faiblesse des allocations de départ en congé, le temps de repos est-il remplacé par celui des plantations comme source immédiate d’approvisionnement alimentaire et ultérieure de revenus.
Le résultat est que le fonctionnaire et l’ouvrier africain ne se reposent pas suffisamment pour ré emmagasiner le volume d’énergie nécessaire au renouvellement de la force de travail. Ainsi, par manque de vitalité d’une grande part de sa population active, dû à la mauvaise utilisation du temps des loisirs et de repos, il s’installe une léthargie collective qui fait du tertiaire africain le moins productif de la planète. Troisièmement, enfin, l’horloge cultuelle des sociétés traditionnelles. Dans les sociétés traditionnelles et, toujours de nos jours, en milieu rural, cette horloge est le chronomètre qui organise les cycles de la vie cultuelle et rituelle.
L’horloge cultuelle se subdivise en temps de rites occasionnels (funérailles, mariages, naissances, danses profanes, etc.) et en temps de cultes saisonniers (cérémonies initiatiques, cultes religieux, cultes de purification, etc.). Partout en Afrique noire cette horloge pose un problème d’inadaptation dans les contextes du temps de travail modernes.
En voulant à tout prix transposer en milieu urbain le mode traditionnel de gestion des funérailles, sans tenir compte de la complexité de ses rythmes et méthodes d’organisation et sous prétexte d’éviter la déperdition des valeurs culturelles ancestrales, on perturbe l’horloge socio-économique en la plongeant constamment dans l’improductivité. D’abord le cortège funèbre freine la circulation, crée des embouteillages, retarde les usagers de la route et entraîne l’absentéisme de la grande masse des parents et amis qui vont prendre part à la cérémonie d’inhumation.
Puis, selon les sociétés, les us et coutumes, l’ensemble de la période de deuil, dans certains pays, peut aller jusqu’à un mois au cours duquel chaque jour est une veillée jusqu’à l’aube, sans se préoccuper de la fatigue qui viendrait envahir les gens et anéantir la force de travail d’organismes déjà affaiblis par toutes les formes de stress urbain modernes.
Paradoxalement, dans de nombreux Etats africains, des citoyens pétris de cultures nationales semblent avoir pris conscience de l’importance du temps dans la gestion moderne des activités socio-économiques et ont commencé à faire fonctionner des entreprises funéraires avec toute leur panoplie de services qui permettent d’alléger les rituels traditionnels. C’est sans doute une manière de montrer que l’on peut adapter les mentalités traditionnelles à l’organisation sociétale moderne.
Cependant, il y a encore de nombreuses résistances à cette lente évolution. Le temps des mariages Le mariage urbain moderne, à l’État civil, se révèle être la plus belle synthèse de gâchis énorme de temps, d’argent et d’énergie. Il est d’abord la projection en ville des moments de réjouissances traditionnelles dans toute leur durée, leur environnement familial et leurs agapes. Il est aussi le mimétisme de la symbolique des festivités de mariage des sociétés bourgeoises d’Europe dans ce qu’elles comportent de splendeur.
Avec ses fastes imités d’Europe et sa forte convivialité émanant du système traditionnel de parenté, le mariage à l’Etat civil moderne est l’une des sources de dépenses à fonds. La relation entre temps et argent est trop directe. On dilapide ainsi, en un mois de préparatifs, ce que on aura réussi à épargner en 10 ans. Alors quid de l’investissement dans les Etats africains dans un tel contexte de gâchis ? Lamentable.
De même le temps que prend un journal radio ou télévisé en Afrique et au Congo-Kinshasa plus particulièrement est incroyablement dégradant car il est hors du temps. Ainsi s’agissant de ce dernier pays, là où RFI prend juste 10 minutes, TOP CONGO, TELE 50 ou RTNC prendront l’une ou l’autre 1h d’information, en ce compris la page magazine dont des discours fleuves du chef de l’Etat congolais, sans compter diverses activités des membres du gouvernement et compagnies !
⦁ Une question d’ordre culturel, structurel et temporel : la réformation de l’Etat-continental congolais en système fédéraliste comme un antidote à la balkanisation
La question de vie ou de mort pour tous les Congolais en ce moment : la peur de la balkanisation de leur pays. Cette question ne concerne ni l’avenir du président Félix Tshisekedi ni celui de sa famille biologique, de ses amis, de ses connaissances, de ses ministres, de ses députés, de ses sénateurs et qu’en savons-nous encore, mais le peuple, le souverain primaire. Le même qui lors des dernières élections l’avait élu à plus 80% à la magistrature suprême.
Il s’agit au contraire de sauvegarder le destin et l’avenir du peuple congolais dans sa structuration comme peuple, Etat et nation. Le temps presse. Et c’est le temps de la réflexion, de l’esprit, de la spiritualité, de la mentalité, de l’épistème, de la praxis et surtout de la décision.
C’est ainsi que qu’il s’agisse de la révision constitutionnelle, du dialogue inter-congolais, de l’organisation des concerts divins ou religieux primitifs au Stade de Martyrs, la priorité des priorités consiste dans les moyens à inventer, à produire et à créer pour arrêter dans l’œuf le processus de balkanisation. Aujourd’hui, il faudra aux congolaises et congolais plus de savoir que de pouvoir ou d’argent.
Un tient vaut mieux que deux tu l’auras, dit-on. Ils sont appelés en d’autres termes à plus d’imagination et de détermination face à l’ogre de la balkanisation. Officiellement la RDC n’est pas encore balkanisée. Mais elle subit déjà les affres de la balkanisation, dans la mesure où plusieurs de ses territoires sont sous occupation des troupes rebelles et rwandaises.
Si nous privilégions le pouvoir et l’argent au détriment du savoir, la RDC sera bel et bien balkanisée. Or rien mais alors rien ne nous rendra jamais le Congo-Kinshasa une fois balkanisée par les dépeceurs euro-occidentaux, coutumiers de faits, membres de l’OTAN, de l’UE, avec derrière eux leurs branches respectives armée pour l’ONU et judiciaire pour le TPI.
Delà à la conviction selon laquelle l’homme congolais lui-même serait le premier responsable de sa propre déliquescence politique, économique, sociologique, technologique, il y en aura qu’un pas à franchir. Et de même pour l’homme africain subsaharien dans sa globalité. En effet si après plus de six décennies d’indépendance politique, l’homme euro-occidental blanc met la main ou continue à le faire sans désemparer sur la RCD et sur l’Afrique subsaharienne, ce qu’il le fait grâce et avec les complicités internes, c’est à-dire avec la bénédiction des Congolais et des Africains subsahariens eux-mêmes. L’impérialisme extérieur ne se réaliserait jamais, sans la collaboration de l’impérialisme intérieur.
De telle sorte qu’après la décolonisation, il ne serait jamais faux globalement de dire que l’influence euro-occidentale en RDC et dans les pays africains-subsahariens d’une manière globale, est volontaire, motivée, assumée voire même délibérément choisie, plutôt que dictée, imposée de l’Occident ou d’ailleurs.
Dans l’état actuel des choses, nous n’avons aucun souci pour canoniser ce point de vue d’A. Kabou que l’Afrique ne connaît pas de révolutions sociales. Cela s’explique par le fait qu’il n’y a aucune différence de mentalité entre les intellectuels et les masses.
Dans la mesure où « Aucune dictature ne peut se maintenir durablement dans un pays par son seul pouvoir de répression et de corruption. Seule la préexistence d’un terrain social et culturel favorable explique que de tels régimes puissent prendre racine et prospérer » (A. Kabou, Et si l’Afrique refusait le développement ? Paris, l’Harmattan, 1991, p. 92).
De même que « La vie quotidienne des Africains n’est pas régie par un mouvement de balancier ou les cœurs saignants seraient constamment déchirés entre les deux termes d’une cruelle alternative : être ou ne pas être soi-même. II n’y a pas, à proprement parler de déracinement, mais plutôt une sorte de mauvaise conscience à l’égard des valeurs traditionnelles.
C’est en ce sens que le dualisme tradition-modernité est fallacieux : il postule le progrès des mentalités vers une ouverture après avoir diabolisé les valeurs de la modernité. Le métissage culturel donne un mythe reposant sur la conviction erronée que la compréhension des civilisations et des traditions réciproques est le préalable sine qua non de la communication interculturelle » (A. Kabou, Et si l’Afrique refusait le développement ? Paris, l’Harmattan, 1991, p. 92).
Quant à nous, le problème de l’homme africain noir est également celui de sa sensibilité comme adduction aux plaisirs du monde et en particulier charnels. Dans « Peau noire, masques blancs », F. Fanon montre comment « De la partie la plus noire de mon âme, à travers la zone hachurée me monte ce désir d’être tout à coup blanc, ironisait F. Fanon, Je ne veux pas être reconnu comme Noir, mais comme blanc. Or – et c’est là une reconnaissance que Hegel n’a pas décrite – qui peut le faire, sinon la Blanche ?
En m’aimant, elle me prouve que je suis digne d’un amour blanc. On m’aime comme un Blanc. Son amour m’ouvre l’illustre couloir qui mène à la prégnance totale … J’épouse la culture blanche, la beauté blanche, la blancheur blanche. Dans ses seins blancs que mes mains ubiquitaires caressent, c’est la civilisation et la dignité blanches que je fais miennes » (F. Fanon, Peau noire masques blancs, p. 51).
Conséquence, le rationnel continue à fuir l’homme noir. Chez lui, tout ne se passe jamais comme chez les autres. Parce que pour servir les idées des maîtres, les servants de l’impérialisme, de l’hégémonisme, de l’occidentalisme et donc de l’eugénisme, décapitent à la machette, à la hache, à la bêche, à la kalachnikov ceux qui refusent ou boycottent tous ces « ismes ».
En Afrique, le pouvoir pour le pouvoir est au-dessus de l’humanité et de toute humanité. Mieux vaut gouverner un pays vide ou habité par des squelettes humains. Du moment que les maîtres sont servis derrière, mieux ça va. Les droits de l’homme attendront. Les élections n’ont la valeur qu’elles ont que lorsque les servants musèlent les oppositions.
L’autre n’est pas une fin-en-soi, mais uniquement un moyen pour parvenir à une fin. Ainsi quant aux principes moraux et éthiques énoncés par Kant, ils ne valent que l’lorsqu’il s’agit de faire la leçon aux peuples non-euro-occidentaux, mais jamais pour les dirigeants occidentaux eux-mêmes qui instrumentalisent les chefs d’Etats africains subsahariens. Maitres et élèves privilégient l’impératif hypothétique (qui n’est pas moral) au détriment de l’impératif catégorique (qui est moral), alors qu’ils savent pertinemment qu’il soumet le bien au désir (fais ton devoir si tu y trouves ton intérêt), ou bien si tes sentiments spontanés t’y poussent).
Les occidentaux ne peuvent pas l’ignorer, parce qu’ils savent bien qui l’auteur de cette célèbre distinction entre la morale hypothétique et la morale catégorique et qui s’appelle E. Kant, un Allemand pure souche. Ils savent aussi que pour bien traiter un être humain, il faut choisir la morale catégorique parce qu’elle est celle où il n’y a ni conditionnalité ni calcul (fais ton devoir sans conditions).
Mais les Occidentaux l’ignorent. Dans le même ordre d’idées, ils n’ignorent pas non plus la très sérieuse recommandation de J. Habermas entre l’agir stratégique et l’agir communicationnel pour arriver à une éthique de la discussion véritable. Mais ici également ils préfèrent en cas de conflit l’agir stratégique, la propagande, en lieu et place de l’agir communicationnel, pour trouver un accord. Toutes les guerres, toutes les agressions auxquelles nous assistons dans le monde non-occidental et en Afrique plus particulièrement sont la résultante d’un empiètement des principes soulevés par ces deux grands philosophes occidentaux.
Or l’homme politique africain subsaharien, qui ne soucie guère de l’héritage générationnel à léguer, n’anticipe jamais le futur, et se fait toujours surprendre à la fin de son règne par ses propres maitres. Le combat mené par les Etats de l’AES n’est pas inutile. C’est le combat de l’Afrique. Toute l’Afrique. L’Afrique appartient aux Africains. L’Afrique est africaine. Mais pour que l’Afrique appartienne aux Africains, il faut des citoyens rompus à la création, à la production, à l’invention.
Comme plusieurs panafricains avant eux, les chefs d’Etats de l’AES, ont prouvé qu’il est possible, quand on est chez soi et fier de l’être, en créant, en produisant, en inventant, d’instaurer une rupture responsable avec cette citoyenneté imposée de l’extérieure, celle de l’Europe occidentale précisément. « Sir Alan Burns dans « Le préjugé de la race et de couleur », montre comment « Le préjugé de couleur n’est rien d’autre qu’une haine irraisonnée d’une race pour une autre, le mépris des peuples forts et riches pour ceux qu’ils considèrent comme inférieurs à eux-mêmes, puis l’amer ressentiment de ceux contrains à la sujétion et auxquels il est souvent fait injure.
Comme la couleur est le signe extérieur le mieux visible de la race, elle est devenue le critère sous l’angle duquel on juge les hommes sans tenir compte de leurs acquis éducatifs et sociaux. Les races à peau claire en sont venues à mépriser les races à peau sombre, et celles-ci refusent à consentir plus longtemps à la condition effacée qu’on entend leur imposer » (F. FANON F., Peau noire masques blancs, p. 95).
Vérité suprême temporelle, nous sommes et restons convaincu que ce ne sont pas les hommes qui changent, développent et transforment la société, mais les idées, les mentalités culturelles et civilisationnelles ensemencées dans leur essence praxéologique. En panne épistémiquement et praxiquement, nous avons prôné et proposé à l’homme congolais dans son ensemble la thèse d’une réformation de l’Etat congolais du système électoraliste, du système unitariste-centraliste au système fédéraliste-éclaté, mais aucune suite ne nous est jamais parvenue, bien au contraire, on penche au contraire selon toute vraisemblance pour le changement de la Constitution !
Pourtant à la suite de nos diverses interventions scientifiques et médiatiques et lors d’une conférence-séminaire de Master 1&2, qui eût lieu à la faculté de philosophie de l’Université Catholique du Congo le jeudi 06 Juin 2024, intitulée « La pensée scientifique à la rescousse de la transformation mentale de la République Démocratique du Congo par la réformation de l’Etat du système électoraliste et centraliste-unitaire pour le système fédéraliste et éclaté», nous revîmes également résumé sur notre quête globale consistant dans la réformation de l’Etat-RDC en système fédéraliste, malgré l’indifférence et la sourde-oreille de la présidence de la république et du gouvernement.
C’est ce résumé-là qui en été fait lors de cette conférence-débat que nous allons ressortir en trois temps. Premièrement le système électoraliste fait d’organisations permanentes, récurrentes est la cause du sous-développement voire du blocage politique, économique, sociologique, technologique, civilisationnel, historique ; bref culturel » en République Démocratique du Congo.
Ce système n’est rien de démocratique. Ce ne sont pas toujours les élus proclamés qui le sont réellement. Tout est joué d’avance. Les machines à voter sont instrumentalisées en fonction des élus du pouvoir, qui ont besoin de la majorité absolue. L’ampleur de la contestation apporte de l’eau au moulin de son discrédit. Davantage encore les récurrentes crises de légitimité. En Afrique, et pour être clair, l’élection ne sert pas nécessairement l’électeur mais au contraire l’élu et delà la famille restreinte voire élargie de celui-ci.
En général c’est l’affaire d’un pauvre, qui arrive à l’Assemblée nationale, au Sénat, au Gouvernement, à la présidence de la république et qui se construit une vie nouvelle, en reniant tout de ses origines modestes faites pourtant des souvenirs essentiels. La preuve est là. On le voit à chaque fois que le peuple se déplace pour voter. Malheureusement, limiter épistémiquement, handicapé rationnellement, réflexivement, intellectuellement, l’électeur africain noir se fait constamment avoir.
Conséquence, l’électeur dépose machinalement le même geste chaque cinq ans ou sept ans après, c’est selon le pays, sans qu’évidemment sa situation personnelle, sociale change. Multipliant à l’infini ses frustrations. Mais sans jamais se révolter, c’est-à-dire sans faire la révolution. C’est ainsi à chaque fois, on entend soit les mêmes déclamations d’y avoir été dupé, soit les mêmes menaces de ne plus voter pour untel ou untel autre.
Mais pour du beurre, parce que la fois prochaine c’est les mêmes élus, pourtant honnis, qui reviendront encore et encore. Pour l’élu – le politicien congolais, africain noir ou euro-occidental – si l’élection est un jeu, genre « un qui perd gagne » voire « un qui gagne, gagne », un « qui ne risque rien n’a rien », du côté du peuple, c’est souvent un désastre lorsque, par la suite il ne se retrouve pas dans les résultats de son vote.
Sur le système électoraliste, Laurent Mauduit dans son livre « Les imposteurs de l’économie », taillant et stigmatisant ceux qu’il appelle « Les agents doubles de la pensée unique », écrit : « D’Alain Minc à Jacques Attali, nous avons pu en prendre la mesure : cette OPA que la finance a faite sur le monde des économies, et, au-delà, le système de l’oligarchie française, produit nécessairement de la « pensée unique ». Le peut voter, la démocratie peut faire son œuvre… les mêmes survivent à toutes les alternances et enferment toutes les politiques économiques dans le « cercle de la raison ». Tout peut changer, mais rien ne change. C’est l’éternel commandement que nous avons déjà évoqué, celui de Tina ». « There is no alternative » … » (MAUDUIT L., « Les imposteurs de l’économie », Gawsewitch, 2012, p. 233).
Deuxièmement nous avons présenté deux options dont l’Etat unitariste-centralisé d’un côté et l’Etat fédéraliste-éclaté d’un autre côté. S’agissant du premier type de forme d’Etat, l’unitarisme, le centralisme, notre argument est que le centralisme socio-politico-administratif est un argument pour la balkanisation de la république Démocratique du Congo.
Parce que la concentration de l’Etat dans la capitale Kinshasa ne peut aider le Congo à aller de l’avant. Car bien que le centralisme soit la forme la plus courante dans la plupart des pays, cette forme de l’Etat ne convient pas à la République Démocratique du Congo au regard de son immensité. En effet un pays aussi grand physiquement parlant, on est bien d’accord, devait se réformer en système fédéral pour être bien dirigé ou gouverné.
Ainsi on peut bien centraliser le pouvoir politique à Kinshasa mais si l’Etat n’arrive pas dans les coins et recoins constituant son étendue au même moment, il restera constamment faible voire inutile, sénile, futile, ridicule comme c’est le cas au jour d’aujourd’hui. On aura beau changer les gouvernements, interchanger les hommes, si c’est le même système actuel, le centralisme, le pays ne se développera ni se transformera politiquement, économiquement, technologiquement, civilisationnellement, culturellement. Enfin quant au second type d’Etat, le fédéralisme, il est dans la situation actuelle de la République Démocratique du Congo, le seul qui est un antidote contre la balkanisation. Le pouvoir doit réformer l’Etat et passer au système fédéral ou éclaté.
En tout cas malgré des failles voire manques propres à n’importe quel système politique, avec le fédéralisme ou la forme de l’Etat éclaté, le pouvoir congolais sera omniscient et omnipotent, c’est-à-dire présent partout et nulle part ailleurs au même moment.
⦁ Pour conclure sans conclure
Les Etats-Unis d’Amérique, la tête de pont de l’OTAN, de l’UE, de l’ONU et du TPI ont horreur des grands espaces. La guerre RUSSIE-UKRAINE est la résultante d’une telle hantise. C’est la Troisième Guerre Mondiale. Mais qui ne dit pas son mot. Sous l’Administration démocrate Clinton, les USA ont activé la théorie du dominos. Cette théorie s’appelle également le basculement. LEX-YOUGOSLAVIE en a fait les frais. Le SUD-SOUDAN en est la résultante africaine.
Or si nous continuons à ignorer le savoir et à mépriser le temps, la RDC n’y échappera pas. Les charlatans de la démesure devraient se ressaisir pour réorienter la gouvernance de notre président de la République. Cette réorientation c’est sur la réformation de l’Etat congolais, plutôt que sur la révision constitutionnelle ou le dialogue inter-congolais.
Ce n’est nullement la révision ou la modification des certains articles de la Constitution, qui empêchera la balkanisation, mais au contraire la maîtrise du temps, le savoir, l’épistémisation et la praxisation de la gouvernance. « Le philosophe grec Zénon d’Elée, note A. Toffler, affirmait que si un voyageur parcourait chaque jour la moitié du chemin qui le séparait de sa destination finale, il ne pourrait jamais parcourir y parvenir puisqu’il lui resterait toujours une moitié à couvrir.
Semblablement, il se peut que nous n’atteignions jamais au savoir ultime sur aucun sujet, mais nous pouvons toujours faire un pas de plus, qui nous rapprochera d’une compréhension complète. En principe du moins, le savoir est indéfiniment extensible » (A. Toffler, Les Nouveaux pouvoirs, Fayard, 1991, p. 38).
Ces propos, à eux seuls, mettent en lumière les enjeux du dialogue Nord-Sud et le rapport des forces entre les pays riches et les pays pauvres. C’est là qu’il va falloir que les charlatans de la démesure changent de métier pour devenir épistémiques, réfléchis, praxiques plutôt que flambeurs, nuitards, danseurs absolutistes. Ce rapport des forces avec l’Occident est dans le savoir, qu’il faut aux Congolais d’atteindre pour sauver leur pays de la balkanisation ou du moins éteindre ses racines.
Malheureusement incompétent complet et absurde, personne ne peut crier à l’injustice, concernant l’homme congolais. Et encore moins de parler de non-assistance en personne en danger. Il n’est pas en danger. Il vit dans la jouvence et dans l’insouciance. Tous les matins et soirs, les bars, les supers marchés, les églisettes sont bondés. Et tout le temps souriant, les dents dehors, qu’il pleuve ou qu’il fasse chaud. La guerre à l’est du pays ne le préoccupe nullement. D’autres s’en chargeront. Notamment le Pape François précisément. Il pourra parler à leur place.
Pendant ce temps-là, lui, il se la coule tout doucement. Voilà l’esprit congolais et négro-africain en général : le Corps au détriment de l’Esprit. L’africain noir entretient le Corps. L’Européen s’occupe de son Esprit. Il n’y a pas de surprise que l’un (le Noir) pourrisse, meurt pauvrement, tristement et que l’autre (le Blanc) s’y éternise, se développe et développe, se transforme et transforme, se crée et se recrée, se produise et se reproduise, s’y invente et s’y réinvente.
Enfin de compte, si nous échouions dans notre tentative de déconstruction d’une citoyenneté congolaise plus exemplaire du développement et de transformation, nous proposerons d’ores et déjà deux pistes de solution consistant premièrement à amorcer une procédure de recrutement des populations éparses et venant de toute part blanches, jaunes, rouges ou noires pour venir soit remplacer l’homme congolais actuel, incompétent complet, soit cohabiter avec lui pour lui apprendre les vertus de la création, de la production et de l’invention pour le développement et la transformation d’un espace géographique, qu’on appelle un pays, un Etat, une nation; soit secondement en la faveur d’un processus médicalisé par les manipulations et mélanges génétiques d’ordre anatomico-biologique, la science médicale enfanterait un autre type d’homme congolais mieux éduqué, instruit, intelligent, épistémique, moralement, éthiquement praxéologique et sinon grâce à la voie juridico-administrative par la naturalisation ou l’adoption.
Fait à Kinshasa, le 01er Octobre 2024
10 :40
OSONGO-LUKADI Antoine-Dover
Habilité à Diriger des Recherches de Philosophie
Docteur en Philosophie et Lettres
Professeur d’Universités
Membre de l’Association des Philosophes Américains (APA)-2007-