(Par Omer Nsongo die Lema)
La proposition angolaise des négociations directes entre, d’une part, la RDC et, de l’autre, le M23, est au centre d’un déchaînement des passions que la raison, elle-même, peine à comprendre ! Pour l’heure, par médias interposés, pro-Fatshi et pro-Naanga/Bisimwa se rentrent dedans avec une violence telle qu’ils sont prêts à s’étriper au propre comme au figuré. Ces deux camps se sont dotés chacun d’une « armée numérique ». Récemment, un parti de l’Uns s’est annoncé à Rotana hotel pour réclamer l’intégration de ses…5.000 « soldats » dans la Communication parallèle ou jumelle…
L’Opposition n’assume rien ; le pouvoir assume tout !
Sur ce terrain là – l’expérience faisant foi – l’avantage a toujours été du côté de l’opposition. Peu importe d’être dotée d’une « armée médiatique » ou pas, peu importe pour celle-ci d’être « numérique » ou pas : l’Opposition n’assume rien, à la différence du Pouvoir qui assume tout. Une loi universelle veut qu’on ne demande qu’à celui qui a.
En temps de guerre ou en temps de paix, le Pouvoir a l’inconvénient de s’engager sur tous les fronts. Dont celui de la gouvernance institutionnelle où se mêlent et s’entremêlent les enjeux politiques, diplomatiques, sécuritaires, économiques et sociaux. Juste un exemple : malgré la guerre à laquelle le pays fait face, les fonctionnaires attendent leur paie, les hommes en uniforme leur solde, et tous leurs outils de travail à échéance due. Guerre ou pas guerre, la rue gronde quand il n’y a pas de carburant, de transport, d’électricité, d’eau, voire de compétition sportive ou simplement de concert.
Le front de l’opposition politique, guerre ou pas, s’estime en droit de contester tout ce que fait la Majorité, même quand il y a du positif.
Tandis que le front de l’opposition armée (peu importe la qualification qu’on lui applique) a pour objectif, ou plutôt pour obsession, au mieux de partager le Pouvoir (comme sous Joseph Kabila), au pire de susciter sa chute (comme sous Mobutu).
Déjà, dans les faits, l’opposition politique et l’opposition armée se nourrissent de chaque raté survenant dans le chef du Pouvoir. Elle en vient à surdimensionner tout ce qui affecte le Pouvoir dans la gouvernance institutionnelle, même le petit accident de roulage impliquant un cortège officiel. C’est de bonne guerre, dirait-on.
C’est pour l’unité d’esprit et de corps
Face à cette évidence, la Communication d’État tout comme la Communication parallèle ou jumelle proche n’ont pas à utiliser les mêmes méthodes que la Communication de l’Opposition politique ou de l’Opposition armée.
Le combat n’est pas le même. La Communication d’État a ses canaux officiels pour s’exprimer. Ceux de l’Institution Président de la République sont connus :
- Le Chef de l’Etat en personne (quand il s’exprime sous forme d’un discours ou d’une interview),
- Le Porte-parolat et
- La Cellule de Communication.
En toute logique, en dehors de ces trois canaux, il n’y en a pas un autre qui puisse l’engager formellement. Même pas celle (jumelle) du parti ou du regroupement qui, pour rappel, est une entité privée. Or, que constate-t-on ces derniers jours, particulièrement autour de l’initiative angolaise ?
D’abord, on voit le Président de la République effectuer un déplacement à Luanda le 11 mars 2025. C’est, du reste, la Présidence de la République d’Angola qui en fait écho et annonce les négociations directes entre la RDC et le M23.
Ensuite, on entend la Porte-parole Tina Salama en rappeler le cadre. Entre autres le Processus de Nairobi et la Résolution 2773 du Conseil de l’Onu.
Enfin, on apprend que le Président Félix Tshisekedi y donne sa caution.
Depuis, les canaux officiels n’ajoutent rien d’autre si ce n’est l’audience accordée le 14 mars 2025 par le Président angolais Joao Lourenço à Mambu Sita Sumbu, responsable au cabinet du président Tshisekedi chargé du Suivi du Processus de Luanda.
Curieusement, les 13 et 14 mars 2025, d’autres sources se réclamant de la Majorité vont parler de rétractation de Félix Tshisekedi sans en mesurer les conséquences. La Communication pro-Opposition en fait ses choux gras. L’info a une ampleur telle que le doute s’installe.
Voilà que le 15 mars, la Présidence de la République d’Angola envoie des invitations officielles à l’Etat congolais et au M23 enjoints à respecter un cessez-le-feu à dater du dimanche 16 mars.
Les deux ailes (politique et armée) de l’Opposition vont imputer la rétractation aux encadreurs spirituels qui auraient perçu des signes négatifs pour le Chef de l’Etat.
Plus grave : la Communication pro-Tshisekedi s’installe dans un double langage qui dérange sérieusement. La « cohésion nationale » à ce niveau fait flop.
Pourtant, dès l’instant où le Chef de l’Etat a pris position, sa Communication – toutes tendances confondues – devrait, devait, doit et devra l’accompagner ! C’est pour l’unité d’esprit et de corps.
Après tout, Félix Tshisekedi est censé être l’homme le mieux informé du régime par rapport à la guerre. C’est lui, et encore lui seul, qui a le pouvoir du bon choix par rapport à la gestion de l’agression rwandaise et à tout ce qui s’y rattache.
S’il accepte d’encourager Luanda, ce n’est pas pour piéger Lourenço ! Ou si Lourenço l’encourage dans la voie de négocier avec le M23, ce n’est tout de même pas pour le piéger. Pour les deux chefs d’Etat, la préoccupation première est de résoudre le problème fondamental de l’existence même du Congo en tant qu’Etat.
Ne jamais remettre en cause le choix du Chef de l’Etat
S’agissant de son refus de négocier avec le tandem M23-AFC qu’il présente comme une coquille vide, il n’y a pas de quoi en faire un drame, ni fouetter un chat s’il en vient à changer d’avis. En politique, ce langage se comprend quand il y a crise. Pour être proche de l’actualité à l’international, on sait comment Israël traite Hamas, l’Ukraine et la Russie se traitent.
Au pays, Mobutu, Mzee Kabila et Joseph Kabila sont passés par-là. Ils commençaient tous par rejeter tout face-à-face. Félix Tshisekedi ne réinvente pas la roue. La différence avec ses prédécesseurs se situe au niveau technologique atteint par Internet, à l’heure ou à l’ère des réseaux sociaux.
A ce même propos, qui se souvient encore de la « tradition » instaurée par Étienne Tshisekedi entre 1990 et 1997. Elle consistait à qualifier Mobutu de « monstre » la veille, pendant ou après chaque rencontre annoncée. Cela n’empêchait pourtant pas la rencontre (toujours de la dernière chance) d’avoir lieu. Et on avançait.
Pour être plus proche de nous, qui se souvient encore de tous les noms d’oiseaux attribués à Joseph Kabila la veille, pendant et après les négociations du Centre Interdiocésain catholique en 2016 ? Malgré cela, les négociations avaient donné lieu à l’Accord politique ayant organisé la transition 2017-2018.
La constante pour la Communication d’État est de ne pas déroger aux règles établies. Dont celle de défendre le Chef de l’Etat, garant de l’ordre institutionnel, sans verser dans la surenchère.
Quant à la Communication parallèle ou jumelle, elle avait à cette époque pour consigne de réagir aux attaques de l’opposition sans toutefois verser dans l’injure. Mais, surtout, de ne jamais remettre en cause le choix du Chef de l’Etat.
Or, à quoi assiste-t-on actuellement ? Certains Communicateurs pro-Tshisekedi en viennent à s’en prendre à la Médiation ou Facilitation pendant que d’autres – quand ce ne sont pas les mêmes – promettent l’enfer aux Occidentaux. Dont les Américains redevenus soudain utiles à la suite de l’annonce de l’exploitation des minerais stratégiques en contrepartie de la sécurisation du pays face à l’ogresse rwandaise.
Ainsi, les Communicateurs pro-Tshisekedi sont, eux-mêmes, les premiers à rendre la tâche dure au Chef de l’Etat, oubliant que la Communication politique peut se révéler un couteau à double tranchant pour la Majorité au pouvoir, particulièrement en période des négociations.
Celles de Luanda débutent le mercredi 18 mars 2025 ! Le contexte n’est pas favorable aux électrons libres…